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Dans l’ancien régime, on recherchait le culte ou la croyance des candidats. La restauration réservait toutes ses préférences à ceux qui partageaient ses doctrines politiques ou religieuses : système imprudent, triste héritage des discordes civiles. Un gouvernement sage s’attache à étendre le cercle de ses adhérens, loin d’entretenir de jalouses inimitiés. La recherche des opinions doit être interdite dans les temps ordinaires et pour la plupart des emplois. La conscience du fonctionnaire n’est pas moins inviolable que celle du simple citoyen. Cependant il est des époques et des emplois qui ne permettent point cette indifférence absolue. Après des commotions politiques, il convient, comme le demandaient les états-généraux en 1483, de choisir des hommes « étrangers aux troubles qui ont agité l’état. » Quand le pouvoir n’est pas assis, quand les partis sont encore en armes, il serait imprudent de confier à des mains ennemies une part d’autorité. Il en est de même en tous temps de certains emplois dont le caractère est essentiellement politique et dont les titulaires doivent reproduire sans altération la pensée, les tendances et l’esprit du gouvernement.

Ces conditions générales d’âge, d’état civil, de moralité privée, ne constituent qu’une aptitude commune et ne peuvent conférer aucun titre, si elles ne trouvent un complément nécessaire dans des garanties plus spéciales et plus directes : c’est surtout à l’entrée de la carrière que ces garanties doivent se placer. Un fonctionnaire public, de quelque ordre qu’il soit, n’acquiert pas en un jour toutes les qualités requises : les plus habiles se forment de longue main, par l’étude qui donne les connaissances générales, par la pratique qui donne l’expérience relative. Au début de toutes les professions se trouve l’apprentissage, et les hommes qui se vouent au service public en sont moins dispensés que d’autres. Il est du devoir de l’état d’imposer à tous ceux qui lui proposent leur concours, l’obligation de s’y préparer de bonne heure. Il est de son intérêt de les y préparer lui-même dans certaines branches de l’administration qui exigent une capacité plus déterminée et plus définie. Les diverses mesures prises dans ce double but constituent ce qu’on peut appeler, en termes généraux, le noviciat des services publics, noviciat dont les conditions et les formes sont aussi nombreuses que variées. Dans certains services, l’état adopte dès leur première jeunesse les sujets qui se montrent dignes de sa confiance, il leur donne dans des écoles spéciales l’instruction nécessaire, les initie à ses principes, à ses doctrines d’administration, et se les assimile, pour ainsi dire, par une éducation prolongée. Dans d’autres, il subordonne l’admission des jeunes aspirans