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En 1808, il institua des juges auditeurs, auprès des cours, et voulut qu’ils fussent nommés sur des listes de candidats présentées par ces cours elles-mêmes, et composées d’avocats attachés au barreau depuis deux ans au moins. Ce souvenir des antiques prérogatives des parlemens, chargés jadis de faire des présentations analogues, aurait dû plaire à un gouvernement qui affectait toutes les formes de l’ancien régime ; cependant la restauration s’en écarta- complètement, lorsqu’elle étendit l’institution des juges auditeurs aux tribunaux de première instance. Aucune condition ne fut attachée aux nominations, et les choix ne tardèrent point à prouver qu’un esprit exclusif et partial présidait à la composition des corps judiciaires. L’opinion s’en était émue, et quand éclata la révolution de juillet, l’institution même des juges auditeurs fut emportée. En ce moment, il n’existe aucun séminaire pour les augustes et sévères devoirs de la magistrature ; on a cherché à combler cette lacune en conférant aux jeunes aspirans, à titre de début, l’emploi de juge suppléant, créé dans d’autres vues et pour d’autres besoins, et constitué dans des conditions incompatibles avec cette destination d’emprunt. Les juges suppléans jouissent de l’inamovibilité qui ne doit point appartenir à une position d’épreuve. Ils ne peuvent être nommés qu’à vingt-cinq ans, tandis que l’emploi de substitut, réservé à leur avancement, peut être obtenu à vingt-un ans. La nomination des juges suppléans n’est d’ailleurs, soumise à aucune autre condition que le diplôme de licencié en droit et deux années de barreau, plus souvent oisives que laborieuses. Dans ces derniers temps, un autre noviciat paraît avoir été établi ; nous voulons parler des avocats attachés à certains parquets et désignés ainsi dans quelques actes de nomination royale. Nous ne pouvons discuter un titre qui n’est reconnu par aucune décision de l’autorité publique, qui n’existe pas légalement et qui n’est même pas admis dans tous les parquets. Dans cet état de confusion, nous n’hésitons pas à dire que l’avenir de la magistrature est compromis, et que si elle maintient intacte sa vieille réputation de droiture et d’impartialité, rien ne se fait pour que les lumières y restent toujours à l’unisson des mœurs. Il est urgent d’y pourvoir, en constituant un noviciat judiciaire. Que les jeunes gens destinés à la magistrature reprennent le titre d’auditeurs, nous n’y faisons aucune objection, mais il ne faut pas que leur nomination soit livrée à la volonté discrétionnaire du gouvernement. Là est la condition virtuelle du rétablissement de l’institution. On a dit que les auditeurs de la restauration avaient péri dans le mouvement de 1830, parce qu’ils étaient inamovibles, et qu’ils pouvaient néanmoins, par le