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Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 14.djvu/332

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propose. M. Jules de Lasteyrie, dans un discours plein de faits judicieusement observés, a donné au débat des allures plus vives, en venant porter contre l’administration de la marine des accusations d’imprévoyance auxquelles nous aimerions à pouvoir reconnaître que M. le ministre a complètement répondu. Une critique non moins vive et plus redoutable encore a été présentée par M. Billault. C’est en s’armant des déclarations de M. le prince de Joinville que l’honorable orateur, avec la verve qu’on lui connaît, a attaqué l’ensemble de l’administration maritime. M. Thiers doit aussi prendre la parole dans cette discussion, et M. le ministre des affaires étrangères ne pourra manquer de lui répondre. Du reste, la résolution bien connue de l’opposition ne permet d’entretenir aucun doute sur l’issue de ce débat. La chambre ne voudra pas, en accueillant les propositions de la commission, se donner un démenti à elle-même. Nous devons d’ailleurs ajouter que les dernières explications de M. l’amiral de Mackau ont été reçues avec faveur par l’assemblée.

L’attitude du cabinet à l’ouverture de ce débat semblait étrange et embarrassée. Si M. l’amiral de Mackau est le collègue de M. Guizot, la commission est composée d’amis politiques et personnels de M. le ministre des affaires étrangères. On se rappelait l’expédition de Madagascar, abandonnée par le ministère malgré la vive résistance de l’amiral qui l’avait préparée avec l’entière approbation du conseil. Allait-on voir se reproduire le même exemple de bon accord ? La chambre scrutait avec curiosité l’attitude et le langage ; mais la résolution à peu près unanime de l’opposition a dispensé le cabinet d’un acte de faiblesse, et garanti à M. de Mackau le concours de tous ses collègues. Nous en félicitons le pays, qui gagnera à cette résolution un accroissement considérable de ses forces navales ; nous en félicitons surtout l’opposition, qui ne peut que s’honorer en n’abandonnant pour aucun intérêt transitoire les intérêts permanens de la France.

Après cet important débat, la chambre s’occupera des crédits supplémentaires, et elle rencontrera encore ici le département de la marine. On sait que ce ministère réclame un accroissement notable du cadre d’officiers, accroissement admis en principe par la commission chargée d’examiner les crédits supplémentaires demandés pour l’exercice courant, mais refusé, dit-on, par la commission du budget. La chambre aura donc à se prononcer, sous quelques jours, sur ce conflit, dont l’issue préoccupe vivement le personnel maritime. Elle mettra probablement ensuite à l’ordre du jour les chemins de fer de l’ouest et celui de Mulhouse, puis le projet sur la taxe des lettres, dont le rapport a été déposé hier par M. Vuitry. On croit généralement que les crédits spéciaux de l’Algérie seront discutés au chapitre du budget de la guerre qui se rapporte à notre grand établissement. La discussion, ainsi concentrée sur un seul point, sera plus complète et plus solennelle. On persiste à dire que l’idée principale énoncée dans le rapport de M. Dufaure sera la création ; d’un nouveau ministère spécial pour les affaires d’Afrique, et que l’honorable membre défendra cette idée avec prédilection.

On compte toujours pouvoir faire les élections le 4 juillet. Les opérations électorales dans la garde nationale de Paris et l’échec très significatif subi par M. Oger sont venus troubler un peu la quiétude dans laquelle on vivait depuis trois mois. On commence à comprendre qu’il y a de l’inconnu dans le résultat