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de tubercules, ont quelque chose de repoussant. Comme la plupart de ses congénères, le gecko des murailles, connu vulgairement sous le nom de terrentola, est la terreur des habitans du pays, qui le regardent comme très venimeux, et le voient avec effroi courir rapidement le long des murailles les plus unies, où ses griffes et les écailles qui garnissent ses doigts lui font facilement trouver un point d’appui. Cependant, rien dans ce qu’on nous en a dit n’approche des récits effrayans recueillis par quelques voyageurs en Orient ou au cap de Bonne-Espérance. Là les geckos sont regardés comme des êtres maudits semant la mort autour d’eux, donnant la peste par le simple contact, et tantôt faisant périr en quelques heures, tantôt frappant d’une lèpre incurable le malheureux qu’ils ont mordu même légèrement. Qu’y a-t-il de vrai au fond de ces exagérations évidentes ? C’est ce qu’il n’est pas facile de reconnaître. Toutefois, lorsqu’on se rappelle les contes, absurdes dont sont l’objet dans nos campagnes la salamandre et le timide orvet, on est conduit à penser que les geckos peuvent fort bien être des animaux parfaitement innocens, que leurs habitudes nocturnes ont surtout contribué à rendre un objet de terreurs peu ou point fondées.

Tandis que M. Blanchard faisait une guerre active à ces populations terrestres et aériennes, M. Edwards et moi reportions tous nos efforts du côté de la mer. A nos moyens d’investigation déjà si variés, nous allions en ajouter un plus puissant encore. Cette fois nous ne voulions plus seulement explorer les parties accessibles du rivage ou draguer au hasard. Il s’agissait de descendre au fond de la mer en conservant toute sa liberté d’action, de poursuivre ainsi les animaux marins jusque dans leurs retraites les plus cachées, jusque dans les anfractuosités de ces roches qui, profondément enfoncées sous les eaux, semblaient défier tous nos efforts. L’exécution de ce projet, dont l’idée appartenait à M. Edwards, exigea quelques tâtonnemens. Il fallut s’assurer du bon état des appareils, en combiner la disposition, prévoir les accidens possibles, et s’assurer des moyens d’y remédier. Au bout de quelques jours, tout fut disposé, et après quelques essais préliminaires, M. Edwards fit sa première excursion sous-marine dans le port de Milazzo. Pendant plus d’une demi-heure, il parcourut en tout sens le fond du bassin, retournant, des pierres, examinant brin à brin les touffes d’algues, recueillant et observant sur place des zoophytes qui vivent à une profondeur de dix à douze pieds. Depuis lors, M. Edwards s’est enfoncé bien plus profondément encore, et dans la baie de Taormine entre autres, nous l’avons vu à vingt-cinq pieds sous l’eau manier la pioche pendant près de trois quarts d’heure pour tâcher d’atteindre une de ces grandes panopées de la Méditerranée, espèce de molusque bivalve dont on ne connaît encore que les coquilles.