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net de 10. La position reste donc excellente pour vous, et vous pouvez être généreux à bon marché. C’est ainsi que la circulation des billets doit contribuer à la baisse du taux de l’intérêt, et il n’y a pas de plus fort argument pour la légitimer.

C’est, en effet, un des traits les plus saillans de l’histoire des banques modernes que leur création a toujours été suivie d’une réduction du taux de l’intérêt. On a toujours attendu d’elles ce service, et constamment elles l’ont rendu aussitôt, comme si elles avaient eu un talisman. On en peut voir la preuve remarquable dans les récits de tous les écrivains financiers au sujet de la création de la Banque de France au commencement du siècle, de l’ancienne caisse d’escompte sous Louis XVI, de la première banque de Law sous la régence ou de la banque des États-Unis en 1791. De même pour la banque d’Angleterre.

La circulation des billets a une autre utilité. Comme instrument des échanges, elle remplace partiellement, et dans une mesure qu’il est possible de régler de manière à écarter tout danger, les métaux précieux qui coûtent cher par du papier qui ne coûte rien. « L’or et l’argent qui circulent dans un pays, dit Adam Smith, peuvent se comparer précisément à un grand chemin qui, tout en servant à transporter au marché tous les grains et les fourrages du pays, ne produit pourtant par lui-même ni un seul grain de blé ni un brin d’herbe. Les opérations d’une banque sage, en ouvrant en quelque manière une espèce de grand chemin dans les airs, donnent au pays la facilité de convertir une partie de ses grandes routes en bons pâturages et en bonnes terres à blé, et d’augmenter par là son produit territorial et le revenu de son travail. »

Par d’autres détails de leur mécanisme, par les habitudes qu’elles inspirent, par les méthodes qu’elles introduisent pour les règlemens de compte, les banques augmentent cette action d’amoindrissement qu’exerce la circulation des billets sur le numéraire métallique. C’est une erreur populaire fortement enracinée, qu’il existe une relation assez étroite entre le degré de la richesse d’un pays et la quantité de numéraire métallique qu’on y rencontre. Les métaux monnayés, après que leur apparition en grande quantité a été chez un peuple jusque-là peu industrieux un signe de l’augmentation du travail et des transactions que le travail engendre, et à ce titre un signe de prospérité, s’éloignent ensuite parce que la monnaie de crédit en papier, ou, plus simplement encore, un système de comptes-courans dans les bureaux d’une maison de banque ou dans ceux d’une institution se substitue aux espèces d’or et d’argent, au grand avantage du pays. Les peuples les plus riches finissent par être ceux qui, toute proportion gardée, emploient le moins de métaux précieux à l’état de monnaie. La diminution s’opère d’une double manière. Ce sont d’abord les réserves métalliques des particuliers dont l’usage des banques restreint chaque jour la masse, c’est