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l’action des feux souterrains, a livré passage, à diverses époques, à des courans de lave très fluide. Ces laves se sont étendues en nappes minces et uniformes tout autour de ces soupiraux ; elles se sont solidifiées et ont formé des bancs de roches plus ou moins compactes selon leur épaisseur. Comme dans les éruptions actuelles, l’émission des matières fondues était accompagnée d’un dégagement violent de fluides élastiques qui entraînaient de grandes quantités de cendres, de scories et de lapilli. Ces matériaux, déjà solides, sortant par toute l’étendue des fentes et retombant en pluie sur le bain de lave, ont formé ces assises fragmentaires uniformes qui alternent avec les bancs de roche.

Pendant bien des siècles peut-être les choses se sont passées comme nous venons de le dire ; mais un moment est venu où l’agent intérieur, qui tant de fois s’était fait jour à travers le terrain, a déployé une énergie extraordinaire, peut-être même à raison de la résistance toujours croissante qui opposaient à son action ces couches, de plus en plus nombreuses et solides. Ne pouvant plus les fendre, il les a soulevées. Ce mouvement violent les a nécessairement rompues, et une large communication s’est trouvée établie entre les entrailles du globe et l’atmosphère. Avant cet événement, selon M. de Beaumont, il y avait dans ce lieu une multitude de volcans éphémères ; depuis cette époque, ils ont été remplacés par un volcan permanent.

Mais on sait que dans les éruptions toutes les matières vomies sont loin d’être solides ou liquides. La quantité de substances gazeuses qui s’échappent par les cratères dépasse de beaucoup en volume les laves et les scories. On comprend donc sans peine que l’énorme voûte formée par le soulèvement de l’Etna a dû bientôt manquer de soutien. Toute disloquée d’ailleurs par l’effort même qui lui avait donné naissance, elle s’est éboulée en grande partie dans les abîmes qu’elle recouvrait, et c’est précisément cet effondrement qui a donné naissance au Val del Bove. Cette origine une fois admise, on s’explique sans peine le rapport frappant des crêtes qui entourent cette vallée avec celle qui porte le volcan. Ces crêtes sont évidemment la continuation les unes des autres. Leur ensemble formait le pourtour de l’espèce d’ampoule soulevée à la surface du sol. La voûte, en s’écroulant, n’a fait que laisser à nu sur les escarpemens du val la tranche des couches dont elles sont toutes également composées et qu’on retrouve sur le Piano del Lago, dans l’intérieur de l’effondrement partiel que nous avons appelé la Citerne[1].

  1. On est naturellement conduit à se demander à quelle époque ont pu se passer les phénomènes dont nous essayons de donner une idée. M. de Beaumont regarde le soulèvement de l’Etna comme ayant précédé immédiatement l’époque géologique actuelle. Il croit que l’épanchement des laves anciennes du Val del Bove est contemporain de la formation des chaînes de l’Atlas, dont l’ensemble forme une ligne bornée à l’ouest par les Canaries et le volcan de Ténériffe, à l’est par la Sicile et l’Etna. Ces déterminations résultent de la Théorie générale des soulèvemens et des conséquences que M. Elie de Beaumont en : a tirées pour l’âge relatif des chaînes de montagnes.