et marcha résolûment jusqu’au bord du chemin. Une détonation retentit, et l’homme tomba. Bientôt les premières lueurs de l’aube éclairèrent le champ de bataille, et les gardes nationaux victorieux relevèrent un cadavre frappé de quatre balles. C’était celui de Portalès. Le premier coup de feu de l’engagement avait été son arrêt de mort.
L’armée révolutionnaire, complètement battue, se dispersa, et ses chefs tombèrent peu de jours après entre les mains des vainqueurs. On les conduisit à Valparaiso, et l’expiation s’accomplit sur la place d’Orégo. Ils furent tous fusillés, et montrèrent au dernier moment un courage digne d’une meilleure cause. Quant à Portalès, il a laissé au Chili de nobles souvenirs, et mieux encore, des institutions salutaires. La réforme du clergé, des cours de justice, la création des gardes nationales, l’organisation de la police, enfin et surtout la confiance du pays assurée à l’action gouvernementale, tels sont les titres de cet administrateur éclairé à la reconnaissance publique. Aussi la douleur causée par sa mort fut partagée même par ses adversaires politiques.
On avait puni les chefs du complot qui avait coûté la vie à Portalès. Il restait à le venger plus complètement. On arrêta de nouvelles dispositions pour lever des troupes expéditionnaires, et, si l’on trouva au Chili même et sans emprunt l’argent nécessaire à cette prise d’armes, ce fut grace à l’économie et à la sage administration financière de Ringifo, l’ami actif et intelligent de Portalès. Un premier effort des Chilenos n’eut aucun succès, mais le second aboutit à la bataille de Iungay, qui renversa Santa-Crux et son édifice politique. L’issue glorieuse de cette affaire, en faisant respecter au dehors le nom chileno, ne doit pas être oubliée parmi les causes de la quiétude parfaite dont jouit la république ; c’est de ce jour que date l’heureuse situation qui aujourd’hui encore se maintient au Chili. Le général Prieto a trouvé dans le général Bulnes, le président actuel, un digne continuateur de sa prudente et ferme administration. La période ouverte depuis la victoire de Iungay n’a été marquée encore que par un progrès rapide et pacifique dans l’ordre matériel comme dans l’ordre intellectuel.
Dans l’ordre matériel, les travaux des mines et les travaux agricoles, ces deux sources de la richesse publique, ont été repris, une fois la tranquillité du pays assurée, avec un redoublement d’ardeur. Il n’y a rien à ajouter à ce qui a été dit dans cette Revue même de la production des mines au Chili[1]. Quant aux travaux agricoles, ils se partagent entre la culture dut sol et l’élève des troupeaux. Le sol n’est pas morcelé au Chili, il est réparti entre quelques grands propriétaires. L’étendue
- ↑ Voyez la première partie du travail de M. Michel Chevalier sur les Mines d’or et d’argent du Nouveau-Monde, 15 décembre 1846.