l’histoire de la dynastie angevine fondée par le frère de saint Louis. M. de Saint-Priest déclare que, parvenu au terme d’une longue et difficile carrière, il n’ira pas se perdre dans l’embarras incertain de ce labyrinthe. Loin de se perdre, il nous y eût fort bien conduits, pour peu qu’il l’eût voulu. Qu’il ne s’en prenne de nos exigences qu’à lui-même : si son récit historique était moins attachant et moins clair, nous ne lui reprocherions pas de ne l’avoir pas assez prolongé. Un lumineux aperçu de l’histoire de la maison d’Anjou, resserré dans des limites convenables, eût donné à la dernière partie de l’ouvrage de M. de Saint-Priest plus d’ampleur et de gravité.
Encore une critique, et nous n’aurons plus qu’à dire tout le bien que nous pensons de l’Histoire de la conquête de Naples. L’écrivain a voulu composer un livre dont l’allure rapide et brillante mènerait jusqu’au bout ceux qui l’auraient ouvert ; il y a réussi : seulement son style ressemble trop parfois à la conversation d’un homme du monde qui raconterait les impressions que lui auraient laissées ses lectures, avec abandon, avec esprit, avec trop d’esprit. On trouvera peut-être que voilà de notre part une étrange querelle. Expliquons notre pensée par un exemple : M. de Saint-Priest, après avoir esquissé à grands traits les exploits et la vie d’un des plus fameux représentans de la race normande, Roger II, roi de Sicile, ajoute : « Enfin, Roger mourut à l’âge de cinquante-huit ans, comblé de richesses, de puissance et de gloire. Brave, habile et fin, le fondateur de la royauté en Sicile fut un politique, un législateur et un héros, mais un héros bas-normand. » Voilà de ces saillies auxquelles un historien ne doit pas s’abandonner. Nous savons bien que Voltaire, même au milieu de ses développemens historiques les plus purs et les plus beaux, ne s’est jamais refusé une plaisanterie ; mais les défauts de cet inimitable démon ne sauraient servir de justification à personne.
Maintenant, nous louerons hautement M. de Saint-Priest d’avoir su traiter son sujet sans y introduire ces couleurs, ces enluminures par lesquelles tant d’écrivains ont défiguré le moyen-âge ; il a su parler du XIIIe siècle en homme du XIXe, sans engouement comme sans antipathie. Cette impartialité n’a pas empêché le style de l’écrivain d’être pittoresque ; elle n’a pas étouffé non plus chez lui l’amour de son pays et une certaine préférence pour les races méridionales. On sent qu’après la grandeur de la France M. de Saint-Priest ne désire rien plus vivement que la grandeur de l’Italie et son indépendance. Ces sentimens donnent à son livre un caractère qui le distinguera d’une manière heureuse. Trop souvent des historiens modernes, en s’occupant du moyen-âge, ont eu l’air de considérer la suprématie germanique comme un fait légitime que devait accepter l’Italie. C’est ainsi que, de nos jours, un des célèbres professeurs de l’Allemagne, M. Léo, dans son Histoire