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la Bessarabie, qui gémit sous la domination moscovite, mais aussi les Roumains de la Transylvanie, lancés par la révolution autrichienne sur la scène où se débat le destin de la Hongrie. Soulevés, à l’exemple des Illyriens et pour des motifs analogues, ils ont associé leur cause à celle des peuples qui réclament la réorganisation de l’Autriche sur le principe de l’égalité des races. Les Magyars leur font violence en les incorporant à la Hongrie ; mais leur individualité, leur existence politique comme race n’en triomphera pas moins : ils n’en obtiendront pas moins une place à part dans cette confédération d’états que les Slaves élaborent par la parole et par l’épée pour la nouvelle Autriche. Trois millions de Valaques de la Transylvanie et de la Hongrie se trouveront ainsi constitués, représentés à titre de nation dans le parlement fédéral des races autrichiennes. Un événement d’une aussi grave portée pour les populations roumaines est destiné à donner au sentiment national des Moldo-Valaques la plus vive et la plus haute impulsion. Or, en même temps que les Valaques de la Transylvanie sont conduits, par la force des choses, à embrasser la politique des Illyriens de la Croatie, les Illyriens de la Servie sont entraînés, par une puissance toute semblable, à épouser les passions, les craintes et les espérances des Valaques de l’empire ottoman. Le même protectorat qui accable la Moldavie et la Valachie, et qui les entrave dans leur essor, pèse presque aussi rudement, quoique de plus loin, sur la Servie. Les Serbes, comprenant, comme les Moldo-Valaques, que l’intégrité de la Turquie, est leur sauve-garde, que la race turque ne peut plus leur nuire et peut encore les protéger, ont vu dans t’intervention armée du protectorat un grand péril pour cette politique. Leur susceptibilité s’est éveillée ; ils ont indiqué au sultan combien ils seraient heureux de trouver un beau jour l’occasion de vider avec les Russes leur querelle et la sienne. Puis, se rapprochant des Valaques, parmi lesquels leur prince actuel, Alexandre Georgewitz, a long-temps mené la vie de l’exil, ils leur ont fait entendre à eux-mêmes un langage amical, qui est l’expression vraie de leurs sentimens. Les Bulgares, les Bosniaques, les Monténégrins, suivront la voie qu’il plaira aux Serbes d’ouvrir à ces enfans mineurs de la famille illyrienne, de telle sorte que les Serbes, en se réunissant aux MoldoValaques dans un commun respect pour la suzeraineté ottomane, dans une commune haine du protectorat, engagent avec eux toute leur race dans cette alliance ; et, comme un travail fécond s’accomplit, chez ces jeunes peuples, comme ils reçoivent à chaque moment de vives inspirations des événemens de l’Autriche, comme ils ont de l’ardeur, de l’ambition et de l’élan, ils entretiennent au sein même de la Turquie, à côté des Valaques, un foyer d’agitation, d’où leur viendront toujours de vigoureux encouragemens et de chaudes sympathies. La défaite des Moldo-Valaques ne saurait donc être que momentanée, et le mouvement