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se sont glissés ou plutôt maintenus dans l’administration des terre des dessas ; mais le détail nous en mènerait trop loin. Il importait de constater d’abord que les quotes-parts de sawas sont loin de contenir toutes la même superficie ; elles diffèrent aussi en qualité : les meilleures sont ordinairement la part du chef et des membres du conseil municipal. Les terrains qui viennent ensuite appartiennent à la première classe des habitans, de ceux qui sont les plus aisés, parce qu’ils possèdent beaucoup de buffles. On distingue cette classe des autres par la dénomination d’orang-tanni ; elle équivaut à ce que nous appelons en Europe bons fermiers. La seconde classe prend les meilleures terres parmi celles que les autres ont laissées, et ce qui reste après ce triage est partagé entre les habitans de la troisième classe. La quatrième classe d’habitans, qui se compose de pauvres journaliers, est entretenue par les notables, qui s’en servent pour faire cultiver leurs sawas et faire leurs corvées hors du dessa. Ils n’ont point de part à la répartition des sawas. La vie nomade qu’ils mènent pour la plupart ne permettrait pas d’obtenir d’eux, sans de grandes difficultés, le paiement de la rente des terres qu’ils auraient reçues en partage. Cette classe peut être en tout point assimilée à nos pauvres métayers d’Europe, à qui, pour les faire travailler, il faut fournir les semences et les instrumens aratoires, ainsi que la nourriture pour toute la famille.

Il est naturel qu’on ait tenu compte de cet état de choses dans la répartition de l’impôt et que les notables aient plus à payer que les autres. D’ailleurs, les habitans des dernières classes n’ayant pas de buffles, ce sont ceux des premières classes qui les fournissent, lorsque le gouvernement exige quelque culture spéciale de leur dessa. Ils les prêtent aussi aux habitans des deuxième et troisième classes pour la culture de leurs sawas, etc. D’après les habitudes et coutumes locales, ce sont eux encore qui, lors des tournées des employés, tant européens qu’indigènes, fournissent les provisions de bouche, l’huile de lampe, les lits, le bétel, le tabac, les chevaux, tant pour ces chefs que pour les personnes de leur suite, tandis que les deux dernières classes sont seulement chargées de couper l’herbe pour les chevaux et de porter les bagages jusqu’aux haltes ou stations prochaines. Ainsi les deux dernères classes sont dans une dépendance absolue vis-à-vis des premières, auxquelles elles sont forcées de s’adresser, et par qui elles sont assistées dans leurs besoins.


III

Il nous reste à apprécier le système des cultures dans ses rapports avec le système de l’impôt territorial, et ici nous avons un fait grave à signaler. Le mode de rétribution adopté par le gouvernement pour le