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LES ÉTATS D’ORLÉANS.
LE DUC DE GUISE, à part.

Maudite femme ! je te vois venir.

LA REINE-MÈRE.

Que craignez-vous, tant qu’il est dans vos mains ?

LE DUC DE GUISE.

Ce que nous craignons, madame !… Mais nous mériterions d’être jugés, d’être punis nous-mêmes, si nous avions le malheur de différer d’un jour un acte de justice dont le royaume attend son salut et sa tranquillité. Voulons-nous respirer en paix ? Il faut bien en finir avec cette infernale race de mutins et de sectaires..

LA REINE-MÈRE.

Il faut surtout ne pas allumer le feu en croyant souffler pour l’éteindre. Ne l’oubliez, monsieur le duc, il y a une noblesse et un peuple en France.

LE DUC DE GUISE.

Oui, madame, un peuple qu’on empoisonne tous les jours, une noblesse à moitié rebelle : c’est pour cela qu’il est grand temps d’agir. Que restera-t-il debout dans ce royaume si nous souffrons qu’on s’attaque impunément à toutes choses ? Vous m’étonnez, madame, je m’ébahis de vos ménagemens ! N’est-ce donc pas à vous, n’est-ce pas à vos enfans qu’on déclare la guerre ? Laissez choir notre sainte religion, laissez-nous dépouiller de ce reste d’autorité que le roi nous confie, et vous verrez qui soutiendra le trône de votre fils ! Au lieu de gémir sur ce grand acte que vient de faire le roi, vous devriez remercier le ciel et nous encourager, car nous allons du même coup abattre vos deux plus grand ennemis, l’hérésie et la rébellion.

LA REINE-MÈRE.

Et si vous les faites pousser avec plus de furie ? Voilà ma crainte, monsieur le duc. Vous coupez, vous ne déracinez pas. Mais brisons là. N’essayons pas de nous convertir, nous risquerions de nous mal quitter. Aussi bien, je vois revenir M. de Cypierre… Vous me saurez gré de lui céder la place. (M. de Cypierre reste dans le vestibule.)

LE DUC DE GUISE.

Cypierre attendra, madame.

LA REINE-MÈRE.

Vous avez mieux à faire avec lui qu’avec moi… Adieu, monsieur le duc… Vous dites donc que ces pièces sont là… chez le roi ?

LE DUC DE GUISE.

Votre majesté se ravise ?…

LA REINE-MÈRE.

Puisque vous le souhaitez… je les veux voir.