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Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 2.djvu/879

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dont nous sommes nous-mêmes le plus éclatant témoignage. Cette diète, ce congrès qui représente les gouvernemens, c’est la dernière force qui reste au pouvoir au milieu des agitations du pays ; ne détruisons pas cette force, si c’est la réforme et non le bouleversement de l’Allemagne que nous désirons. » Tel est le résumé des paroles de M. Welcker, et aussitôt les applaudissemens éclatent. Ces conseils pleins à la fois de hardiesse et de modération, ce grand sentiment de l’ordre joint au sentiment non moins vif des devoirs de l’Allemagne nouvelle, avaient enthousiasmé une partie de l’assemblée. Cependant la gauche proteste, et les tribunes poussent des clameurs furieuses. Alors les députés du centre et de la droite, debout et interpellant les spectateurs : « Vous ne nous intimiderez pas ! point de terrorisme ! Nous voulons délibérer librement ! » Le désordre devient général, et M. Welcker a besoin de toute son énergie pour dominer le tumulte. « Je renouvelle ma proposition, s’écrie-t-il avec force ; je demande que le comité s’entende avec la diète. Devant une institution régénérée, les vieilles attaques n’ont plus de sens. Avez-vous un autre intermédiaire pour parler aux gouvernemens ? Avez-vous un autre organe pour agir sur la Prusse et sur l’Autriche ? Vous n’en avez aucun : sachez donc vous servir de celui-là. »

M. Hecker, ou le pense bien, n’est pas de cet avis ; ce qu’il veut, ce qu’il demande avec force déclamations emphatiques, c’est la permanence de l’assemblée et la suppression de la diète. Chose étrange ! Presque tous les députés qui lui succèdent à la tribune semblent d’accord avec les républicains. Sur une vingtaine d’orateurs, à peine en est-il trois qui s’unissent à la pensée de M. Welcker ; leurs noms méritent d’être signalés : c’est M. Ruiler (d’Oldenhourg), M. Venedey, et le futur ministre de l’empire pour les affaires étrangères, un avocat d’Hambourg, M. Heckscher. Soit entraînement involontaire, soit rancune invétérée contre le nom seul de la diète, soit désir de conserver pendant un mois une part de souveraineté, les plus modérés inclinent du côté de M. Hecker. Ils savent bien cependant que la diète est profondément modifiée, ils savent que les gouvernemens ont remplacé leurs anciens envoyés par des hommes éminens du parti libéral, ils savent que M. Welcker, que le poète Uhland, que plusieurs autres encore y ont pris place et y feront triompher l’esprit nouveau ; mais non, ils ne veulent rien savoir, la rancune l’emporte, et, pour satisfaire des haines surannées, l’assemblée va se jeter follement dans une voie révolutionnaire. Le danger presse ; il est temps qu’une voix puissante vienne rallier les troupes dispersées. M. Henri de Gagern est à la tribune. M. de Gagern reprend, pour l’agrandir, la proposition de M. Welcker. Il veut un comité, un comité qui sera plus fort que l’assemblée des notables, parce qu’il sera moins nombreux ; un comité qui sera une plus fidèle