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des Sémites[1], et cette opinion nous semble la moins improbable. Toutefois, en présence du manque absolu de renseignemens précis, nous confesserons l’impuissance actuelle de la science. Tout en réservant l’avenir, nous verrons avec Prichart, dans les Euskariens, un débris de l’ancienne race ibérique, et dans celle-ci une race aborigène, c’est-à-dire une population qui, antérieurement à nos temps historiques, vivait sur le sol où nous en trouvons encore aujourd’hui les restes.

Quoi qu’il en soit, les Ibères paraissent avoir subi une première perte de territoire, lorsque les Liguriens, partis des bords du fleuve Libys, que l’on croit être la Loire, s’emparèrent des côtes comprises entre le Rhône et l’Italie. Plus tard eut lieu la grande invasion des peuplades celtiques dont les descendans occupent presque tout l’occident de l’Europe. Les Celtes, plus forts, plus guerriers, exterminèrent partout les Euskariens, qui ne trouvèrent d’asile que dans les gorges sauvages des Pyrénées[2]. Là, favorisés par la nature des lieux, aguerris par la nécessité ; les débris de ces nations formèrent plusieurs petites républiques confédérées[3], et luttèrent avec avantage contre des invasions nouvelles. À dater des temps historiques, nous voyons tous les conquérans venir se briser contre les forteresses naturelles que le courage des montagnards rendait imprenables. Carthaginois, Romains, Goths, Francs, Sarrasins, essaient tour à tour de subjuguer les Basques. Ils les battent souvent en bataille rangée, ils ravagent leurs vallées et leurs collines, parfois même ils les soumettent momentanément ; mais cette sujétion n’est jamais que temporaire ou nominale, en ce sens que les Euskariens ne perdent jamais leur nationalité et repoussent obstinément tout ce que leur apporté l’étranger, mœurs et langage. À vrai dire, les populations euskariennes étaient, pour leurs prétendus dominateurs,

  1. Recherches sur l’origine des peuples du Nord. M. Vivien de Saint-Martin qui a bien voulu me communiquer ses notes sur les travaux de Arndt, de Rask et de Dartey, regarde l’opinion de ce dernier comme insoutenable historiquement, mais comme probable, si l’on se place au point de vue des caractères physiques. Tel est aussi notre avis.
  2. D’après M. Chaho, les péans, tartaro, dont il est question dans les contes populaires, ne seraient autre chose que les Celtes.
  3. Les principales tribus euskariennes étaient, à l’époque des guerres puniques, les Cantabres et les Vascons. Ces derniers ont donné plus tard leur nom à l’ensemble de ces provinces et aux populations elles-mêmes. Les Basques actuels sont les descendans immédiats de la race vascone.