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à la complicité généreuse d’un gouvernement noblement inspiré.

Il ne suffit pas cependant de raconter la lutte soutenue par le roi Louis-Philippe contre la loi de bannissement des princes de la branche aînée ; il faut aussi montrer la famille de l’empereur Napoléon protégée tantôt contre les douleurs de l’exil par l’autorisation donnée à plusieurs de ses membres de revoir la France, tantôt contre elle-même par un généreux pardon, comme à l’époque de la tentative de Strasbourg, tantôt enfin contre les embarras d’une position malheureuse, comme en 1847 et 1848, au moment où les ministres avaient reçu du roi l’ordre de demander aux chambres un crédit annuel de 150 000 francs pour constituer au profit du prince Jérôme, l’ancien roi de Westphalie, une pension réversible en partie sur son fils, Jérôme Napoléon. Il y a plus : la munificence personnelle du roi avait déjà protégé un autre Bonaparte. Le sacrifice d’argent ne fut pas considérable sans doute ; il eut du moins, par la pensée qui l’inspirait, une véritable grandeur. Un membre de la famille de l’empereur, jeune encore, éloigné des siens et voyageant en Belgique, était pressé par des créanciers exigeans et sur le point d’être mis en prison pour dettes. Il eut la pensée de faire connaître au roi Louis-Philippe les embarras d’une position qui s’aggravait chaque jour, et bientôt la cassette royale sauva la liberté du neveu de l’empereur.

Ainsi, par un privilège unique peut-être dans l’histoire, la Providence faisait du roi Louis Philippe le protecteur des familles princières au nom desquelles d’implacables factions s’efforçaient incessamment de le perdre dans l’opinion du pays.

Le cœur du roi n’était pas seulement ému par le spectacle des grandes infortunes politiques : les souffrances du peuple attiraient surtout sa sympathie et occupaient sans cesse sa pensée. Dès 1830, pendant que ses ministres proposaient par son ordre aux chambres des mesures destinées à rendre la sécurité au commerce, le mouvement aux affaires et le travail aux ouvriers, Louis-Philippe, donnant l’exemple, établissait de vastes chantiers de travail et de charité dans ses domaines privés ou dans les domaines de la couronne, dont il avait la jouissance provisoire. Sa main surtout s’ouvrait largement pour secourir toutes les misères populaires, que la cherté des subsistances rendait plus cruelles encore. Pendant l’hiver de 1830 à 1831, une somme de plus de 2 millions fut consacrée par lui à des distributions de pain, de soupes, de viande, de vêtemens, de literie et de secours en argent à la population indigente de Paris et des départemens qui souffrait le plus de la disette et de la stagnation des affaires. Ah ! si cette charité, systématiquement enveloppée dans une simplicité discrète, mérite jamais que quelques critiques viennent se mêler aux