Brissy qui exécuta plus tard une ascension équestre. Il s’éleva monté sur un cheval qu’aucun lien ne retenait au plateau de la nacelle. Dans cette curieuse ascension, Testu-Brissy put se convaincre que le sang des grands animaux s’extravase par leurs artères et coule par les narines et par les oreilles à une hauteur à laquelle l’homme n’est nullement incommodé[1].
Les débuts de l’art aérostatique indiquaient déjà, on le voit, quels services l’invention nouvelle pouvait rendre à la science. On pouvait déjà prévoir la période nouvelle, la période d’applications qui allait s’ouvrir pour la locomotion aérienne.
Jusqu’en 1794, les ascensions aérostatiques n’avaient guère servi encore qu’à satisfaire la curiosité publique. À cette époque, le gouvernement voulut en tirer un moyen de défense en les appliquant dans les armées aux reconnaissances extérieures. Cette idée si nouvelle d’établir au sein de l’atmosphère des postes d’observation pour découvrir les dispositions et les ressources de l’ennemi étonna beaucoup l’Europe, qui ne manqua pas d’y voir une révélation nouvelle du génie révolutionnaire de la France. L’aérostation militaire reçut sous la république des développemens assez étendus ; mais Napoléon ne donna pas suite à ces premiers essais. L’histoire est loin d’avoir conservé le souvenir de tous les résultats remarquables obtenus dans l’industrie et les arts pendant la période de la révolution française. Les événemens politiques ont absorbé l’attention, et remplissent seuls nos annales ; tout ce qui concerne les progrès des sciences et de l’industrie à cette époque a été singulièrement négligé. Aussi les documens relatifs à l’aérostation militaire sont-ils peu nombreux. On peut cependant s’aider de ces renseignemens trop rares pour préciser quelques faits qu’il y aurait injustice à laisser dans l’oubli.
Guyton de Morveau avait fait un grand nombre d’ascensions avec l’aérostat de l’académie de Dijon, et ces expériences lui avaient fait concevoir une idée très brillante de l’avenir réservé à l’emploi des ballons. Il faisait partie avec Monge, Berthollet, Fourcroy et quelques autres savans, d’une commission que le comité de salut public avait instituée pour appliquer aux intérêts de l’état les découvertes récentes de la science ; il proposa à cette commission d’employer les aérostats comme moyen d’observation dans les armées. La proposition fut accueillie
- ↑ Ce tour de force a récemment été répété plusieurs fois à Paris par un courageux aéronaute, M. Poitevin. Seulement le cheval était attaché au filet du ballon par un appareil de suspension, ce qui diminuait de beaucoup le danger de l’expérience. À une certaine hauteur, le cheval de M. Poitevin a éprouvé, comme celui de Testu-Brissy, une hémorragie abondante.