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de ses Archives historiques et littéraires du nord de la France, ainsi que ses études sur les trouvères.

Collecteur non moins infatigable que M. Dinaux, M. de Lafons de Mellicocq a rassemblé, dans un ouvrage intitulé les Artistes et les Ouvriers du nord de la France, toutes les pièces qui traitent de la construction des anciens édifices dans la Picardie, l’Artois, la Flandre et le midi de la Belgique aux XIVe, XVe et XVIe siècles. Chercheur intrépide, M, de Mellicocq, à force de fouiller les archives et d’interroger les parchemins, a souvent rencontré des pièces curieuses, et les documens qu’il édite pourraient offrir d’excellens instrumenta ; mais par malheur il aime mieux publier que choisir, et de la sorte il enfouit souvent des choses précieuses sous un fatras d’inutilités. C’est là, du reste, un reproche qu’on peut adresser à la plupart des éditeurs, et surtout aux éditeurs d’archéologique artistique. Sans doute, ce serait se montrer ingrat que de laisser dans l’oubli les noms des hommes qui ont orné la ville France de tant de monumens magnifiques ; mais il ne faut pas confondre les artisans avec les artistes, et, sous prétexte de gratitude et d’admiration, écrire l’histoire des maçons, des charpentiers, et la monographie du prix des clous et des lattes. Ainsi réduite aux infiniment petits, l’érudition perd tout son intérêt, et n’est plus pour l’esprit qu’urne occupation stérile.

Le clergé, dans les départemens du Nord et du Pas-de-Calais, s’est associé, comme partout, au mouvement historique ; mais, dans cette partie de la France où la tradition religieuse est si puissante, il s’est à peu près exclusivement renfermé dans les études hagiographiques. C’est dans cette spécialité qu’il faut ranger le légendaire de la Morinie, qui contient l’analyse des travaux publiés par les bollandistes et par Ghesquière sur les saints de cette contrée, et l’excellente traduction de la Vie de saint Eloi, écrite au VIIe siècle par saint Ouen, traduction à laquelle l’auteur, M. Parenty, vicaire capitulaire d’Arras, a joint une notice, malheureusement trop sommaire, sur une ancienne abbaye d’augustins, située au village du Mont-Saint-Eloi.

Parmi les publications récentes qui ont plus particulièrement pour objet l’ancien Artois, nous placerons au premier rang celles de M. Achmet d’Héricourt, qui, jeune encore, a donné sur cette province une dizaine de volumes, études originales, dissertations ou documens inédits. Dans les trois derniers concours des antiquités nationales, M. d’Héricourt a obtenu des mentions honorables pour une Histoire de l’Administration militaire de la ville d’Arras, une Histoire de Béthune et une Bibliographie arrageoise. De plus, il a publié depuis quatre ans une notice sur Carenci et ses Seigneurs, et les Troubles d’Arras. Carenci, qui n’est aujourd’hui qu’un tout petit village, a été possédé, sous l’ancienne monarchie, par de grandes familles historiques, les Béthune, les Châtillon, les Condé, les Montmorency, et, en retraçant l’histoire de cette localité, M. d’Héricourt a donné sur la constitution féodale du pays des détails exacts et curieux. Les Troubles d’Arras sont la reproduction de XVIe siècle relatifs à la guerre intestine et aux désordres dont cette ville fut le théâtre en 1577 et 1578, et dont la religion fut la cause ou le prétexte. Le plus important de ces documens est un mémoire de l’avocat Pontus Payen, qui appartenait au parti catholique, et qui présente sous un jour très dramatique les événemens dont il fut le témoin et dont il s’est fait le narrateur souvent très