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commerce anglais des avantages équivalens. Durant cette période de 25 ans, les actes législatifs, les ordres en conseil, les conventions diplomatiques se sont multipliés dans une proportion vraiment effrayante pour quiconque veut en aborder l’étude. De temps à autre, le gouvernement comprenait si bien les inconvéniens de cette législation incohérente et diffuse que, dans l’intérêt des contribuables autant que pour l’instruction de ses agens, il éprouvait le besoin de reprendre en entier les lois de navigation et de présenter au parlement un nouveau bill résumant et consolidant (c’est l’expression consacrée) les lois pour l’encouragement de la marine. Tel fut le but des actes des 28 août 1833 et 4 août 1845, Qu’il nous suffise donc, sans entrer dans les détails, d’avoir signalé l’esprit, les tendances des modifications introduites ainsi, par voie directe ou indirecte, dans les anciennes lois, et de constater que chacune des mesures adoptées depuis 1823 était un acheminement vers la réforme radicale qui a été définitivement opérée en 1849. Il convient aussi, avant d’examiner cette dernière phase de la question, de présenter, à l’aide de quelques chiffres, l’aperçu des faits qui se sont produits aux différentes périodes de la législation.

Au commencement du XVIIIe siècle, l’effectif de la marine marchande anglaise dépassait à peine 200,000 tonneaux; en 1827, il atteignit 2,460,500 tonneaux; au 31 décembre 1848, 4,052,000 tonneaux. Quant aux constructions, les chantiers du Royaume-Uni et des colonies ont lancé, en 1821, 74,847 tonneaux; en 1830, 110,000 tonneaux; en 1848, 227,000 tonneaux.

Le mouvement des navires chargés et sur lest, à l’entrée et à la sortie, comprenait, pour le Royaume-Uni, en 1821, 3,869,000 tonneaux; en 1830, 5,799,000 tonneaux; en 1848, 13,306,000[1].

De ces chiffres il résulte que les brèches successivement faites à la prohibition ont ouvert à la navigation britannique des voies plus larges. C’était la protection qui, dès la fin du dernier siècle, avait rendu la marine anglaise si forte et si prospère; mais les pouvoirs publics ont su s’y prendre à temps pour relâcher peu à peu les liens qui gênaient la liberté du pavillon. En effet, ce n’est point en se montrant l’esclave d’une théorie absolue, en pratiquant exclusivement la protection ou le libre échange, sans tenir compte des événemens du passé, des éventualités de l’avenir, ce n’est point ainsi qu’un gouvernement peut garantir à son industrie, à son commerce ou à sa marine un rang supérieur ou honorable dans cette lutte de concurrence qui, sur mer comme sur terre, met en présence tous les peuples : en pareille

  1. Nous avons à dessein pris pour termes de comparaison trois chiffres qui correspondent : 1° à une période antérieure à l’extension du régime de la réciprocité; 2° à l’époque où ce régime était en pleine vigueur: 3° à l’année qui a précédé les dernières réformes.