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Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 14.djvu/436

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et à l’exergue, 30 novembre 1840, date du jour où les restes de Napoléon ont touché la terre de France.

Une médaille de M. Depaulis nous montre le passage à Rouen du navire qui porte ces précieux restes. Cette médaille est conçue dans le même système que celle de Saint-Jean-d’Ulloa. Seulement, l’artiste a supprimé toute allégorie et s’est borné à reproduire le fait tel qu’il s’est passé. Le pont triomphal élevé à Rouen, sous lequel passe le navire drapé, le paysage et les monumens qui forment le fond du tableau, tout cela est un calque précis de la nature que nous ne pouvons admettre en numismatique à titre de système absolu, mais que dans certaines occasions nous aimons à voir appliquer. Quels précieux renseignemens n’auraient pas fournis à l’histoire et à la science quelques centaines de médailles frappées d’après ce système par les anciens ! La médaille de M. Depaulis porte à la face un très beau masque de Napoléon mort, reproduit d’après le moulage pris sur nature par le docteur Antommarchi. Comme on voit, cette médaille n’est pas seulement une commémoration, c’est l’expression la plus exacte et la plus complète de la réalité.

Une troisième médaille de M. Montagny, d’un plus petit module, nous fait assister aux funérailles triomphales. L’artiste nous montre l’immense char mortuaire, traîné par les chevaux drapés, qui vient de passer sous l’Arc de triomphe de l’Étoile, et qui descend la grande avenue des Champs-Élysées, se dirigeant vers les Invalides. Cette médaille offre également une reproduction assez exacte du fait réel, seulement elle pèche par l’exécution ; le dessin est d’une grande faiblesse, et la forme est plutôt indiquée que rendue. Enfin une quatrième médaille du même module que la médaille de M. Galle, et commandée également par l’administration, nous montre l’arrivée du cercueil de Napoléon. La France le reçoit à l’entrée des Invalides, sa dernière demeure. Cette médaille de M. Barre est l’une des meilleures qui aient été frappées à l’occasion de cette solennité funèbre. Le cercueil de Napoléon, couvert d’une draperie ornée d’abeilles et surmonté du sceptre et de la couronne impériale, est porté par de jeunes hommes vêtus à l’antique et figurant la marine, l’armée, le barreau, etc. Le personnage représentant la marine est placé en avant du cercueil ; il s’appuie sur un gouvernail et présente à la France les restes du héros. L’attitude et le geste de cette figure sont d’un naturel parfait ; elle parle, on l’entend. La France vêtue en Bellone indique de la main droite les Invalides, qu’on aperçoit sur le second plan de la médaille. C’est là que le cercueil doit être déposé. Cette médaille porte pour légende : Reliquiis receptis, et à l’exergue : Napolionis funus triumphale. xv. DÉC. 1840. Elle fait grand honneur à M. Barre.

C’est à cet artiste, l’un de nos graveurs les plus habiles et les plus féconds, que l’on doit quelques-unes des médailles les plus remarquables du règne de Louis-Philippe, parmi lesquelles il faut citer encore la médaille des Monumens historiques, celle de l’Arc de triomphe de l’Étoile et le beau médaillon de la Famille royale, l’une des plus curieuses pièces qui aient été frappées dans ces vingt dernières années et le chef-d’œuvre de la gravure. Dans ses nombreuses compositions, M. Barre s’est toujours montré homme de goût, et, dans la position spéciale qu’il occupe à la monnaie des médailles, il a su maintenir, autant que faire se pouvait, les saines traditions de l’art.

Il serait impossible de compter les médailles auxquelles la révolution de février