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médailles destinées aux lauréats de la peinture, de la sculpture, de la gravure et de l’architecture, viennent de paraître. MM. Vauthier-Galle, Bovy, Barre et Caqué sont les auteurs de ces médailles, qui nous paraissent dignes de leur destination. La Peinture de M. Vautier-Galle, la Gravure de M. Barre et l’Architecture de M. Caqué, sont des compositions fort remarquables, et qui maintiennent les trois graveurs au rang qu’ils occupent dans l’école. La Sculpture de M. Bovy est aussi l’une des meilleures médailles qui aient paru dans ces dernières années. Le contraste des formes souples et gracieuses de la jeune femme qui personnifie la sculpture avec le torse énergique du gladiateur sur lequel cette figure s’appuie est une heureuse idée, exprimée avec un rare talent. Le choix des autres accessoires est excellent.

Chacune des phases du dernier mouvement populaire de février, à commencer par la révolution elle-même, a été l’occasion d’un grand nombre de compositions : l’Installation du Gouvernement provisoire, l’Assemblée nationale, le 15 Mai, les Journées de Juin, la Promulgation de la Constitution, et enfin l’Élection du 10 Décembre, ont reçu cette consécration de l’art, qui cependant, on doit le reconnaître, ne s’est jamais mis moins en frais. Il est vrai que, dans la seule année de 1848, les événemens se succèdent avec une si foudroyante rapidité, que chaque graveur qui veut les retracer doit se livrer à l’improvisation, s’il désire arriver à temps. Aussi l’invention des artistes ne s’élève-t-elle qu’à la hauteur des faits divers ou de l’entre-filet officiel d’un journal, dont toutes ces pièces ne sont guère que de petits supplémens en bronze ou en alliage. Cette même fécondité et cette même rapidité d’exécution s’appliquent à ces nombreuses illustrations plus ou moins démocratiques ou sociales et à ces singulières marionnettes politiques qui se succèdent si fantastiquement sur les tréteaux populaires. En effet, de Lamartine et Ledru-Rollin à Huber et à Bianqui, il n’est guère de célébrité révolutionnaire qui n’ait sa médaille, ne fût-elle qu’en étain ou en plomb. Remarquons à ce propos qu’à aucune époque ces médailles d’étain et de plomb n’apparaissent en même quantité. Il suffit en effet d’un balancier de timbre sec, ou seulement d’une enclume et d’un marteau pour les frapper, ou d’un moule en plâtre pour les couler, car beaucoup de ces pièces sont fondues. On peut juger dans quelle catégorie, comme objets d’art et sous le rapport politique, de pareilles médailles doivent être rangées, et quels événemens et quels héros elles célèbrent. Et cependant peu de collections sont plus curieuses et présentent un caractère plus original que celle qui comprend la période révolutionnaire que nous venons de traverser. Cet intérêt, elles l’empruntent à un élément tout nouveau, à l’application plus ou moins volontaire de l’épigramme et du grotesque à la numismatique. Un savant qui applique aux objets les plus divers une intelligente et active curiosité a eu la singulière idée de recueillir les médailles de toute nature qui ont paru du 24 février au 20 décembre 1848, et il en a colligé plus de cinq cents. Il a fait plus, il a fait graver toutes les pièces recueillies, dont il a soin d’indiquer le caractère et l’origine[1]. Cette publication est assurément l’une des plus amusantes qui aient paru sur une époque qui ne l’était guère. C’est que l’auteur ne s’est pas borné à recueillir les pièces officielles et sérieuses, mais qu’il a recueilli avec un égal

  1. Le recueil des pièces gravées qui figurent dans cette collection formée par M. de Saulcy a paru sous le titre de Souvenirs numismatiques de la révolution de 1848.