cipal rôle dans l’émigration coloniale. Il est merveilleusement secondé dans l’accomplissement de son œuvre par le zèle des paroisses, par la bienfaisance de l’aristocratie et des classes riches, ainsi que par l’esprit de spéculation qui a calculé les bénéfices de l’exploitation agricole dans les possessions lointaines. Dirigée par le gouvernement, l’émigration ne pouvait être qu’un moyen d’accroître les forces productives des colonies en même temps que la prospérité commerciale et maritime de la métropole. Sous la direction de compagnies particulières, elle n’a pas tardé à s’élever au rang d’institution charitable, et il lui est permis de venir en aide à toutes ces misères, méritées ou non, dont le soulagement appartient aux sacrifices volontaires de l’assistance individuelle. Dans ce nouvel ordre d’idées, on remarque les combinaisons ingénieuses que la philanthropie a su découvrir pour favoriser l’émigration.
Une loi promulguée sous le règne de George IV autorise les paroisses à subvenir aux frais d’expatriation de leurs indigens. Les fonds peuvent être prélevés sur le produit de la taxe des pauvres, sans excéder toutefois la moitié de ce produit, calculée d’après la moyenne des trois dernières années. Ils peuvent également être recueillis au moyen d’un emprunt spécial, remboursable dans le délai de cinq ans. Cette affectation des revenus locaux doit être votée par les contribuables réunis en meeting et approuvée par les commissaires chargés de l’exécution de la loi des pauvres. Un tel mode de procéder offre pleine garantie aux intérêts de la paroisse ; mais il entraîne de longues formalités, nécessaires seulement lorsqu’il s’agit de recourir à l’émigration sur une grande échelle. Une loi plus récente permet aux administrateurs des paroisses d’affecter, au fur et à mesure des besoins scrupuleusement constatés, des sommes de 10 liv. sterl. à l’émigration des pauvres et en particulier des orphelins, auxquels on procure non-seulement le passage gratuit à bord du navire, mais encore les vêtemens pour le voyage, ainsi qu’une petite somme qui leur est délivrée au moment où ils débarquent dans la colonie. Le législateur a pensé que la commune trouverait profit à envoyer au loin, même au prix d’un sacrifice assez lourd, certaines catégories d’indigens, dont le séjour pèserait pendant de longues années sur le budget de l’assistance. L’idée paraît juste, car en Angleterre l’indigent coûte fort cher à la société, et les dépenses d’expatriation correspondent, en définitive, à une économie réelle sur les frais d’hôpitaux, de prisons et de work-houses. Il faut remarquer cependant que jusqu’ici les paroisses n’ont fait usage que dans une très faible mesure de la latitude qui leur est laissée par la loi, et que les indigens figurent à peine sur les registres de l’émigration ; mais ce n’est là sans doute qu’une question de temps.
Quant aux sociétés qui se sont formées en vue de l’émigration, leur succès semble dès à présent assuré. Ces sociétés sont nombreuses ; elles ont réuni de grands capitaux et fonctionnent sous le patronage des hommes les plus éminens de l’Angleterre ; elles possèdent une autorité morale qui inspire toute confiance. Nous avons sous les yeux les statuts d’une association qui, sous le nom de Family colonization loan Society, s’est proposé pour but « de fonder un système national de colonisation en Australie, et de faciliter l’émigration des classes laborieuses dans des conditions indépendantes, morales et comfortables. »