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embrassent dans leur orbite, et plus elles participent de près à la mission du gouvernement. Profitant de la paix sociale, elles doivent contribuer à la maintenir en se tenant dans leurs œuvres au niveau de l’esprit du temps, en se montrant toujours justes, libérales et bienveillantes envers les travailleurs dont elles utilisent les bras.

Il était d’avance évident qu’une association de capitalistes comme celle des mines de la Loire aurait pour effet d’ouvrir de nouvelles sources de travail. De toute nécessité, il lui fallait tirer parti des fonds accumulés sous sa main, ou subir une rapide et désastreuse liquidation. La compagnie possédait d’ailleurs des moyens d’action infiniment plus larges que les anciennes exploitations, dont la rivalité devenait une source intarissable de procès dispendieux. Fidèle à la loi qui dominait son existence, elle a développé largement la production des houillères, soit en reprenant des travaux abandonnés, soit en étendant le rayon des mines qui existaient déjà, soit en perçant de nouveaux puits. Elle a donc fourni à la masse des travailleurs un nouvel élément d’occupation. Qu’on suppose un instant le cas où cette grande association viendrait à s’écrouler, le désœuvrement et la misère s’étendraient comme une plaie sur le pays. Qui pourrait recueillir cette succession dont l’ouverture serait une véritable calamité publique? Une autre conséquence devait sortir de l’établissement d’une compagnie en mesure de suffire à de larges avances : c’était l’amélioration des moyens de travail. Autrefois on ne descendait pas en général très avant dans les mines de ces contrées; dans les galeries souterraines, les transports s’effectuaient souvent à des d’homme, le charbonnier marchait de pair avec le cheval. Aujourd’hui de meilleurs procédés d’extraction permettent d’attaquer le sol plus profondément. De plus, on a établi dans les galeries des voies ferrées et des bennes[1] à roulettes, qui demandent, il est vrai, à être maniées avec précaution pour éviter les accidens résultant au sein des ténèbres de la rapidité des mouvemens, mais qui constituent néanmoins un véritable progrès. Nous donnerons une idée de la puissance des agens mécaniques employés, en disant qu’à Rive-de-Gier, où des inondations souterraines avaient causé d’immenses ravages en 1836, il existe une vaste machine à épuisement, d’une force de 400 chevaux, qui soutire les eaux des entrailles de la terre dans presque toute l’étendue des concessions de ce bassin appartenant à la compagnie de la Loire.

Cette société dont relèvent tant de familles, cette société exposée aux regards de l’opinion publique et qui avait à justifier son existence mise en question, a dû en outre, dans un temps comme le nôtre, être amenée à prendre une prompte initiative en fait d’institutions

  1. Les bennes sont d’immenses paniers dans lesquels on met le charbon.