Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 4.djvu/1055

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ESCHYLE


ET LE


DRAME POLITIQUE DES GRECS.





Un retour sérieux, une application plus générale aux études antiques serait un des bons symptômes de ce temps : on pourrait en conclure que les besoins moraux s’exaltent, et que le tourbillon industriel n’emportera point les idées. Remonter à l’antiquité, c’est nécessairement rentrer dans les régions idéales et méditatives où la destinée humaine, dépouillée des petites circonstances que le temps efface, se dessine graduellement dans son ensemble à la pensée de l’homme, et lui révèle, sous la lettre des traditions, des significations toujours mieux éclaircies. Sans doute quelques esprits prendront le change, et, renouvelant l’erreur de la renaissance, emprunteront à l’antiquité des formes mortes, des moules brisés : faute de comprendre, ils imiteront ; mais, en somme, les allures et les tendances générales des études antiques seront tout autres aujourd’hui qu’il y a trois siècles. On observera le mouvement du monde ancien, parce qu’il tient au nôtre dans la chaîne des temps suspendue au trône de Dieu ; on y verra l’identité d’une parole divine fractionnée entre les races, mais dont les races, en se réunissant, recomposent les mois épars, comme on restitue une inscription brisée. La poésie surtout, image à la fois des hommes du temps et de l’homme de tous les temps, s’y montrera, au moins chez les Grecs libres, non comme un errement capricieux du génie, mais comme une action nationale, religieuse, lumineuse ; rayon passager, jet rapide, mais dont la lumière, projetée jusqu’à nous, ne s’éteindra plus. De même que l’homme n’est pas connu si l’on n’a pas étudié les premiers phénomènes de sa vie et