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mer des Indes et le calme comparatif du Grand-Océan, tout a une raison d’être, et à côté du fait bien observé, la science doit en placer l’explication.

À la première inspection d’un globe terrestre, la prédominance de l’eau sur la terre frappe les yeux. La terre n’occupe qu’environ un quart de la surface totale du globe, et c’est du côté du nord presque exclusivement que se trouve accumulé tout ce qui, sous le nom de continens, a échappé à l’invasion des eaux. Si l’on place Londres ou même Paris au centre d’une moitié du globe, cette moitié contiendra presque toute la terre habitable. Mais pour sortir de ces données arides, supposons un voyageur partant de France et marchant à l’ouest vers Le Havre, Brest ou Bordeaux, et sillonnant en tout sens la mer qui limite à l’ouest l’ancien continent : il reconnaîtra l’Océan Atlantique franchi la première fois par le hardi Colomb. Ce sera pour lui une profonde vallée submergée allant d’un pôle à l’autre et remplie d’eau salée à une hauteur ou profondeur qui va quelquefois à 10 kilomètres. Cette belle nappe d’eau que le commerce a tant utilisée, et qui voit sur ses deux rivages opposés les races qui tiennent le premier rang dans l’espèce humaine, s’étend d’une manière sinueuse entre l’ancien et le nouveau monde. Bientôt l’observateur reconnaîtra les deux grands continens américains, qui sont bien petits relativement à ce qu’imaginait Christophe Colomb, qui croyait avoir atteint l’extrémité de l’Asie. Colomb, pas plus qu’Améric Vespuce, n’a jamais cru autre chose. Pour eux, l’Océan Pacifique n’existait pas ! Ceux qui donnèrent le nom d’Amérique à quelques-unes des terres découvertes depuis peu ne se doutaient guère qu’ils faisaient à ce nom l’honneur de désigner un nouveau monde distinct de l’ancien. Et cependant l’Océan Pacifique, dont on ne tenait pas compte, a plus d’étendue à lui tout seul que tous les continens réunis de l’ancien et du nouveau monde, même en n’y comprenant pas la mer des Indes.

Après avoir reconnu cet océan presque sans limites, le voyageur atteindra les côtes de la Chine et fixera les bornes du Grand-Océan à ces côtes, aux îles de la Sonde et à la Nouvelle-Hollande ; puis, franchissant un des passages à l’ouest, il se trouvera dans l’Océan Indien, qui n’est pour ainsi dire qu’un demi-océan, puisqu’il s’arrête au nord à l’Asie méridionale, et que, comme l’Atlantique et le Pacifique, il ne va pas d’un pôle à l’autre. Enfin, après avoir longé la côte orientale de l’Afrique et atteint le cap de Bonne-Espérance, il remontera le long de la côte opposée, pour regagner l’Europe en marchant du sud au nord.

On sait que le Portugais Magellan a rendu son nom célèbre par le premier voyage exécuté autour du monde. Après avoir marché à l’ouest et atteint l’Amérique, il la côtoya en descendant au sud jusqu’au