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habitans sur une superficie totale de 400,000 hectares, ou plus d’une tête et quart par hectare, à peu près la même proportion que dans le Bas-Rhin. Heureusement l’agriculture n’est pas tout à fait seule à nourrir cette population. Si l’industrie proprement dite a peu d’activité, le commerce au moins est florissant, grâce aux nombreux ports de la côte, et la condition du peuple paraît meilleure dans le Kent que dans les comtés voisins. La moyenne des salaires d’homme est d’environ 15 francs par semaine, ou 2 francs 50 centimes par jour de travail. En résumé, le Kent ne présente aucun trait saillant, ni en bien ni en mal, à l’observateur. Il forme, par sa physionomie générale comme par sa situation, une sorte de transition entre le nord-ouest de la France et l’Angleterre. Bien supérieur, comme richesse agricole, à la moyenne de nos départemens, il est inférieur dans l’ensemble à nos meilleurs, le Nord et la Seine-Inférieure par exemple. Presque tous les voyageurs le traversent rapidement pour se rendre à Londres, nous ne nous y arrêterons pas davantage. Ailleurs qu’en Angleterre, un pays arrivé à ce point de production et de population serait digne de remarque; ici, il n’a rien que d’ordinaire. Le paysage même, que les Anglais vantent beaucoup, est gracieux Sans être frappant. Tout s’y montre à l’état moyen, la beauté pittoresque comme la richesse agricole.

Au sud-ouest du comté de Kent s’étend l’ancien royaume des Saxons du sud, aujourd’hui comté de Sussex. La rente moyenne des terres y descend à 18 shillings l’acre ou 57 francs l’hectare. C’est encore beaucoup plus que la moyenne des rentes en France, mais fort au-dessous de la moyenne de l’Angleterre. Les salaires aussi descendent plus bas que dans le Kent; ils sont en moyenne de 12 fr. par semaine, ou 2 francs par jour de travail.

L’étendue du Sussex est à peu près égale à celle du Kent, c’est-à-dire d’environ 400,000 hectares, ou les deux tiers de l’étendue moyenne de nos départemens. La population n’y est plus que de 300,000 âmes, ou un peu moins d’une tête par hectare. La moitié environ de cette surface forme ce qu’on appelle le Weald. C’est peut-être la partie de toute l’Angleterre où l’agriculture est le plus arriérée. La faute en est surtout à la nature extrêmement argileuse du sol. Dans les siècles passés, ce pays était couvert de forêts épaisses, comme l’indique son nom, qui signifie bois. Là se trouvait la grande forêt d’Andraswald, mémorable par la mort du roi de Wessex, Sigebert, qui y fut assassiné par un porcher. Encore aujourd’hui, le Weald est remarquable par la quantité de beaux arbres qu’il produit. Il est partagé en fermes de 50 à 200 acres, ou de 20 à 80 hectares, louées de 5 à 15 shillings l’acre, ou de 15 à 45 francs l’hectare. Même à ce prix, la plupart des fermiers ne peuvent pas payer. Ce sont en