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attributions analogues à celles de notre Académie française, celles de veiller au maintien de la pureté de la langue et à la conservation des saines traditions littéraires. Ces attributions s’étendent aux soins à donner aux éditions des classiques arméniens que publie la congrégation et à la recherche de tout ce qu’il est possible de découvrir aujourd’hui des anciens ouvrages que les révolutions et les invasions des barbares ont dispersés de tous côtés ou fait enfouir dans le sein de la terre. Le catalogue de ceux qui ont été retrouvés atteste l’ardeur persévérante de ces investigations. Tandis que les bibliothèques les plus considérables de l’Europe n’ont qu’un nombre très limité de manuscrits arméniens, celle de l’académie de Saint-Lazare en réunit déjà plus de douze cents, et ne le cède en richesse qu’à la bibliothèque du couvent patriarcal d’Edchmiadzin. Le dictionnaire que cette académie a fait paraître en 1836-1837 peut soutenir avec honneur la comparaison avec ce que les sociétés savantes de l’Europe ont produit de plus remarquable en ce genre. Cet immense labeur comprend, en deux volumes in-4o compactes, les richesses de cette langue arménienne inépuisable dans sa nomenclature, et présente chaque mot expliqué et justifié dans son acception par une série d’exemples empruntés aux écrivains des différens âges.

L’imprimerie de Saint-Lazare a dix presses continuellement en activité, et dont les produits s’écoulent par Constantinople, où en est le dépôt principal, dans les provinces de l’empire ottoman, et partout en Asie et en Europe où il y a des Arméniens. Celle des mekhitharistes de Vienne, citée comme un des meilleurs ateliers typographiques de l’empire d’Autriche, n’est pas limitée seulement à l’impression des textes arméniens; elle s’alimente aussi de toutes sortes d’ouvrages écrits dans les principales langues de l’Europe et de l’Orient. Tous ces ouvrages se recommandent par l’élégance et la netteté des caractères et par le relief d’une exécution parfaitement soignée. Pendant longtemps, les publications des mekhitharistes de Vienne ont été conçues uniquement dans des vues d’utilité pratique et appropriées à l’instruction élémentaire. Sous la direction de leur supérieur, Mgr Arisdaguès, ils ont formé une association qui, sous le nom de Société Araméenne, Aramian Enguérouthioun, a pour but de composer et de répandre à très bas prix une suite d’abrégés substantiels analogues, à ceux de nos encyclopédies portatives ou populaires. Aujourd’hui la congrégation, sans renoncer aux publications élémentaires, semble vouloir entrer, par celles qu’elle a faites dernièrement, dans une voie de travaux d’un ordre plus relevé, et aborder, comme l’a déjà fait celle de Venise, le domaine de la haute érudition. Le catalogue des livres sortis de ces deux couvens est curieux à consulter, comme un indice des aptitudes et des tendances de la