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succès de la colonisation africaine pour mettre à leur charge les frais de premier établissement des colons, que l’état est impuissant à fournir et que les compagnies ne fourniraient pas gratuitement. Dans un projet connu sous le nom de villages départementaux, nous avions demandé que les départemens entreprissent eux-mêmes le peuplement de l’Algérie, comme ils ont entrepris et mené à terme l’exécution des chemins vicinaux, c’est-à-dire par les centimes additionnels. Il a fallu vingt ans à peine aux départemens pour doter la France du plus admirable système de communications locales qu’il y ait dans le monde entier. La colonisation de l’Algérie leur coûterait autant de temps peut-être, mais beaucoup moins d’argent que la création des chemins vicinaux, et n’aurait pas des résultats moins admirables pour la prospérité de la France. Outre cette allocation d’une part des centimes additionnels, les départemens se chargeraient de choisir dans leur propre sein chacun un premier contingent de 50 familles qui seraient installées en Afrique dans les conditions de culture les plus rapprochées des habitudes de chaque population émigrante. Ce projet, à peine émis dans la publicité, prévalut dans l’opinion sur tous les autres modes de peuplement proposés. Le gouvernement lui-même, considérant la création des villages départementaux comme acquise en principe, donna l’ordre aux autorités de l’Algérie de lui faire connaître sous le plus bref délai tous les emplacemens qu’on pourrait réserver à l’établissement de la colonisation départementale. « Combien ne serait-il pas à souhaiter, dit M. le ministre de la guerre dans son rapport du 20 mai 1854, que les conseils-généraux reprissent un projet sur lequel mon département, de concert avec celui de l’intérieur, avait appelé leur attention, à savoir : la création de villages départementaux !… La réalisation d’un semblable projet, exécute avec ensemble, serait digne de la France, et aurait des résultats aussi profitables pour la métropole que pour l’Algérie. » De telles paroles engagent, et si l’intention du gouvernement était de saisir les conseils-généraux de la question dans une session extraordinaire, nous pourrions déterminer sans trop de peine dans quels termes elle serait présentée à leurs délibérations ; quelques traits essentiels suffisent en effet pour indiquer l’économie du projet sur lequel on aurait à prononcer.

L’état cède en Afrique à chaque département une étendue de terres suffisante pour y établir 50 familles. Cette étendue sera plus ou moins considérable suivant la plus ou moins bonne qualité des terres et suivant aussi leur plus ou moins grande proximité des centres de consommation et d’écoulement. La réserve communale et le lot attribué à chaque famille seront en rapport avec l’étendue du territoire cédé à chaque département, selon les convenances du sol et de la localité. Autant que possible, les territoires cédés seront favorables aux cultures industrielles. L’état se charge, comme il l’a fait jusqu’ici pour tous les villages d’Afrique, de tous les travaux d’utilité publique, tels que conduites d’eau, abreuvoirs, routes, etc., ce qui représente une dépense moyenne de 100,000 francs par chaque village installé. De son côté, le département s’engage à faire pour chaque famille les frais de premier établissement, représentés par une maison construite et par un matériel agricole adapté au genre de culture qui paraîtra le mieux convenir à la nature et à la qualité du sol, ce qui donne une dépense moyenne de