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faire chasse et maintenir la passe à son embouchure dans la baie de Tineh. Je ferai remarquer seulement que M. Lepère paraît admettre ici, comme sur plusieurs autres points de son mémoire, que le lac Timsah communique avec le lac Menzaleh par une vallée qui aboutirait à Râs-el-Moyeh. C’est là une erreur facile à reconnaître et que la carte de l’expédition contredit formellement. Le lac Timsah est un cul-de-sac, qui est même séparé du lac Menzaleh par le col d’El-Ferdan, dont la hauteur est de 15 mètres, et dont la moindre largeur est d’environ 10 kilomètres.

M. Linant, comptant sur l’exactitude des nivellemens des ingénieurs de l’expédition et reprenant l’idée de M. Lepère, est arrivé à un projet plus rationnel et plus grandiose. Ce projet consiste à ouvrir entre les deux mers une communication libre formant un grand fleuve d’eau salée, ou plutôt, comme l’exprime cet ingénieur, un bosphore. Si on admet en effet que les hautes eaux de la Mer-Rouge dépassent de près de 10 mètres le niveau de la Méditerranée, et que le sol de l’isthme va, comme l’indiquent les nivellemens de 1790, constamment en s’abaissant du sud au nord, en sorte que, pour jeter en masse la mer la plus élevée dans la plus basse, il suffirait de couper les seuils peu élevés de Suez et de Serapeum, la solution la plus économique et la plus complète du problème de la communication des deux mers serait assurément celle que propose M. Linant : la plus économique, car l’ouverture du canal n’exigerait que des terrassemens presque insignifians et pas un seul ouvrage d’art; la plus complète, si, comme M. Linant le croit certain, le grand courant d’eau claire que porterait le canal à la Méditerranée