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île, pendant le peu de mois de son existence éphémère (de juillet à décembre), reçut la visite de Walter Scott presque mourant qui se rendait à Naples. Cependant le romancier survécut à l’île. Enfin on n’est pas moins las des redites sur le temple de Sérapis, dans la baie de Baïa, lequel, entre le IIIe et le XVIe siècle, s’est à une époque inconnue enfoncé sous la mer avec le sol qui le portait pour reparaître plus tard avec ses colonnes percées par les coquillages qui attaquent la pierre et s’y logent. On ne sait si la catastrophe a été subite ou si la dépression a été graduelle et lente. Le terrain paraît aujourd’hui s’abaisser un peu d’année en année. Au reste ce prétendu temple de Sérapis n’est pas plus, dit-on, un temple de Sérapis que la colonne d’Alexandrie n’est la colonne de Pompée, dont elle porte le nom. Si le lecteur se souvient de ce que j’ai dit sur la catastrophe de la Jamaïque[1], où le sol du Quai fut tellement abaissé, que la mer atteignait le faîte des maisons, il lui est facile de juger que si une future commotion relève quelque église engloutie, on observera sur ses murs l’empreinte des animaux marins et des mollusques qui s’y seront attachés. Un fait moins banal est celui des massives pagodes de Mélien-Warom, sur la côte de l’Inde, lesquelles, avec le sol qui les portait, sont descendues presque entièrement au-dessous du niveau de la mer, dont les vagues se brisent contre ces singuliers écueils faits de main d’homme.

En voilà assez sur ce qu’on sait. Voyons maintenant ce qui nous reste à savoir, ou du moins ce qu’on peut espérer de savoir un jour. M. Biot a dit fort éloquemment : « Rien n’est aussi facile que ce que l’on a trouvé hier, mais rien n’est si difficile que ce qu’on trouvera demain. » C’est aussi de cette manière que raisonne la curiosité, toujours avide de l’inconnu. Une fois satisfaite, le prix des objets baisse sensiblement pour elle. L’esprit humain vient à peine d’enregistrer ses récentes découvertes, qu’il aspire à de nouveaux succès. Horace l’a dit dans un beau vers :

Transvolat in medio posita et fugientia captat.

La première de toutes les conséquences qui découlent de la constitution de la terre, c’est sa forme extérieure, qui est exactement celle d’un corps fluide tournant sur lui-même, et par suite se renflant à l’équateur et s’aplatissant au pôle dans la forme d’une orange qui tournerait sur des pivots placés à l’extrémité de sa plus petite épaisseur. La France a eu l’initiative et l’honneur des expéditions destinées à la détermination de la figure de la terre, et dans le siècle dernier, tandis qu’une société d’académiciens partait pour le Pérou et l’équateur, d’autres, s’acheminant vers le sud, allaient, suivant Voltaire,

Geler auprès du pôle aplati par Newton.


Il est juste de dire que Newton n’était pas le premier qui eût aplati la terre.

  1. Voyez la livraison du 15 août dernier.