Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 11.djvu/956

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

professent la religion de Bouddha, les unes demeurées fidèles à la tradition primitive, les autres attachées au culte nouveau, par lequel le réformateur Schigemune essaya de régénérer la foi antique. On connaît les dogmes de cette religion, qui occupe une place si considérable sur la surface du globe. La terre, selon les sectateurs du bouddhisme, est peuplée d’esprits déchus qui doivent, après les épreuves d’ici-bas, monter ou descendre un degré de l’immense échelle des êtres. Les âmes de ceux qui ont bien vécu jouiront d’une félicité éternelle sous la forme de purs esprits ; les âmes des méchans ne quitteront pas la terre, et seront soumises à des épreuves plus dures dans des corps inférieurs. Il n’y a qu’un Dieu, et ce Dieu a pour représentant parmi les hommes un personnage sacré, investi à la fois de tous les pouvoirs spirituels et temporels : c’est le Dalai-Lama, qui habite le Thibet. Après la mort du Dalai-Lama, son âme passe dans le corps d’un enfant nouveau-né, qui devient son successeur. Ne croyez pas que ce soit un nouveau représentant du dieu de Bouddha : le Dalai-Lama est éternel, son âme n’a fait que changer d’enveloppe. Au-dessous du Dalai-Lama, il y a l’élite des lamas supérieurs, et au-dessous de ceux-ci, une légion de simples lamas, qui composent le clergé du bouddhisme.

M. Hansteen possède un des livres sacrés du culte de Bouddha. Le négociant anglais d’Astrakhan qui lui en a fait don avait eu toutes les peines du monde à obtenir d’un lama de Sibérie ce document précieux. L’ouvrage, écrit en langue thibétaine avec des caractères sanscrits, contient l’exposé des dogmes et des pratiques religieuses. On y voit quatre figures représentant les personnages divins. Schigemune, les jambes croisées et la plante des pieds dirigée vers le ciel, est assis sur un banc magnifique couvert de dessins bigarrés. Il porte une coiffure bleue garnie de franges éclatantes, et une flamme en forme de cœur voltige au-dessus de son front. Sa main gauche tient une boule bleue aplatie aux extrémités et surmontée d’une rose d’or. Sa tête est entourée d’une gloire composée de deux cercles d’or rayonnant sur un fond vert. Le visage, le cou, les mains et les pieds sont dorés. À ses épaules est attaché un manteau rouge qui couvre une grande partie de son corps, et parsemé de larges taches. Le personnage tout entier est enveloppé par un grand arc-en-ciel rouge sillonné de rayons lumineux. Au-dessus de l’arc-en-ciel, on aperçoit l’azur de la voûte éthérée, le soleil, la lune et quelques nuages rougeâtres. Schigemune et la figure la plus voisine ont à peu près le même caractère. Le troisième personnage tient une épée de la main droite, et de la main gauche un rouleau de papier blanc. Le quatrième n’a pas, comme les autres, la figure peinte en or ; son teint est composé de blanc et de rose. Il a quatre bras et six