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Berquen, qui, vers le milieu du XVe siècle, eut l’idée de le tailler en usant d’abord deux diamans l’un contre l’autre. En effet, si après avoir monté deux diamans naturels sur deux tiges ou manches en bois, on les frotter pointe contre pointe, on émousse peu à peu celles-ci, et on fait naître en place une face artificielle non polie. Le diamant, dans cette opération, fait entendre un bruit sec et aigre, comme on doit l’attendre d’une matière si dure, qui s’égrène péniblement. Cette face faite, il faut la polir ; pour cela, on a une plaque ronde d’acier ou de fonte qui tourne rapidement comme une meule posée à plat. Il va sans dire que, si on appuyait le diamant sur cette espèce de meule, on mettrait plus d’un siècle à en polir une face. Tout ce qu’on obtiendrait, ce serait un sillon profond, une entaille circulaire que le diamant creuserait dans le fer ou l’acier. Pour user et polir la face posée sur la meule, Berquen eut l’heureuse idée de saupoudrer de poussière de diamant mouillée d’huile la surface de la meule sur laquelle le diamant était posé ; alors l’effet désiré se produisit. La face obtenue par égrénement devint régulière et plane, puis ensuite elle prit un poli parfait : on fut donc maître de donner à un diamant toutes les facettes désirées. Des essais successifs indiquèrent la forme la plus avantageuse à choisir, et voici les deux tailles principales auxquelles on s’arrêta.

La première est celle qui porte le nom de taille en brillant. Il faut, pour cette taille, avoir un diamant à pointes, ou le ramener à cette forme par un travail préliminaire. Ensuite on abat un peu plus de la moitié de la hauteur de la pointe ou pyramide carrée qui est au-dessus, on abat environ un demi-quart de la hauteur de la pyramide d’en dessous, — et alors la lumière, entrant par la grande face que l’on a faite en dessus, allant frapper le fond formé par la petite face, revient en avant, puis, traversant les faces de côté, éprouve l’action connue sous le nom d’effet prismatique. On sait en quoi consiste cet effet : la lumière blanche se décompose dans les sept couleurs de l’arc-en-ciel, savoir le rouge, l’orangé, le jaune, le vert, le bleu, l’indigo, le violet, et ces couleurs, venant à l’œil, lui montrent le rayon rejaillissant teint des plus vives couleurs : c’est ce qu’on appelle les feux du diamant. Pour que cet effet se produise, il ne faut pas que la lumière éclairante soit trop volumineuse, car il y aurait recouvrement des diverses couleurs et reproduction du blanc. Il ne faut pas non plus que les facettes du diamant soient trop larges, car alors l’œil recevrait toutes les couleurs à la fois, ce qui reproduirait encore du blanc. Les gros diamans taillés à larges facettes, comme le Régent, qui appartient à la couronne de France, et le Koh-i-noor, qui appartient à celle d’Angleterre, sont taillés à facettes beaucoup trop grandes et trop peu nombreuses. Il aurait fallu remplacer la grande