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Page:Revue des Deux Mondes - 1856 - tome 4.djvu/604

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était encore, il y a peu d’années, une terra incognita, et l’on commence à peine à recueillir sur ces régions les premières notions rigoureuses. De la Californie, on a étudié la région des placers et la côte du Pacifique, mais l’on connaît encore fort peu certaines parties de cette contrée, et notamment toute la partie méridionale. L’Orégon a été visité surtout à l’époque où ce territoire était devenu un sujet de vives contestations entre les gouvernemens anglais et américain. L’hydrographie des côtes y fut faite alors presque en même temps par le capitaine Belcher, de la marine anglaise, et le capitaine américain Wilkes, qui fit aussi reconnaître le cours de la Colombie, les Montagnes-Bleues et l’intérieur des terres jusqu’à la baie de San-Francisco. En même temps le gouvernement des États-Unis envoyait dans l’Orégon des expéditions par terre à travers les Montagnes-Rocheuses, et favorisait de tout son pouvoir le développement des établissemens américains de la vallée de Willammette.

Quoi qu’il en soit de ces recherches, dirigées plus ou moins heureusement au-delà des Montagnes-Rocheuses, on ne connaît avec quelque détail que la région qui borde l’Océan-Pacifique : la géographie des contrées intermédiaires entre cette ceinture et les états de l’ouest reste encore à faire. Les expéditions américaines n’ont tracé que d’étroits sillons dans cet immense champ de découvertes ; mais ces lignes commencent à être assez rapprochées pour qu’on puisse dès aujourd’hui se rendre compte avec assez d’exactitude des traits et des caractères généraux des grandes provinces de l’intérieur. Pour en connaître la constitution physique, et en même temps pour apprécier les difficultés qu’y présente l’établissement d’un chemin de fer, le seul moyen est de suivre les routes des principales expéditions américaines qui ont dépassé les prairies de l’ouest et franchi les Montagnes-Rocheuses.

Le plus célèbre de tous les officiers américains qui ont attaché leur nom à ces longues et pénibles reconnaissances est le colonel Frémont. Voyageur infatigable, M. Frémont a traversé à plusieurs reprises, dans toutes les saisons, à toutes les latitudes, les parties avant lui si mal connues de f Amérique du Nord ; il a enrichi plus qu’aucun autre, depuis vingt ans, la géographie du Nouveau-Monde, et, à ne parler que de la longueur du chemin, nous ne croyons pas qu’aucun voyageur ait jamais parcouru par terre d’aussi énormes distances. Le récit de ses hardies et émouvantes campagnes forme une introduction naturelle et nécessaire à l’histoire des explorations faites par ordre du gouvernement central des États-Unis, et qui avaient pour but de déterminer la route la plus commode pour l’établissement du chemin de fer du Pacifique. Frémont prit d’ailleurs lui-même une part directe à ces grands travaux, et il n’est aucun des autres officiers