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tude des billets de la banque de Vienne, qui descendaient très bas déjà avant qu’ils n’eussent un cours forcé. Les billets de 10 florins (26 fr.) et de 5 florins (13 fr.) abondaient. Jusqu’ici, rien n’autorise à croire que l’administration autrichienne, dans ses efforts pour dégager le pays du papier-monnaie sous lequel il a le malheur de vivre encore aujourd’hui, pense à changer de système, c’est-à-dire à répudier les billets de banque en petites coupures. Or, quand on a le billet de banque de 13 francs, à quoi bon les pièces d’or? On sait d’ailleurs que, par le fait du nouveau système monétaire auquel l’Allemagne entière vient de se rallier, l’Autriche, de même que tous ses confédérés germaniques, s’est placée dans des conditions telles que les pièces d’or semblent ne devoir jouer désormais chez elle qu’un rôle secondaire, quand bien même, ce qui n’est pas vraisemblable, elle renoncerait aux billets de banque d’un faible montant comme ceux de 26 et de 13 francs. Dans ce système monétaire en effet, c’est l’argent et non pas l’or qui sert de pivot, et qui est l’étalon. L’unité monétaire est en argent, et s’il est vrai que, même avec cette donnée, il soit possible, moyennant certaines combinaisons, d’assurer à l’or une circulation passablement large, on ne voit pas que ces combinaisons soient adoptées ni aient présentement grande chance de l’être; les indications sont plutôt en sens opposé.

Je me place donc au-delà du probable en admettant que l’Autriche offrira, d’ici à un certain nombre d’années, aux producteurs d’or un débouché d’un demi-milliard de francs, soit 145,000 kilogrammes d’or, dans son mécanisme monétaire; mais je veux faire la partie belle aux personnes qui croient qu’il est aisé de trouver un débouché à l’or des nouvelles mines.

Quant à la Turquie, il m’est impossible, quelque bonne volonté que j’y mette, de la prendre au sérieux ici. La Turquie n’a ni commerce ni crédit; ce qu’elle peut attirer et garder en fait de matières d’or est insignifiant en comparaison de ce qui se produit de ce métal, et il n’y a pas lieu de lui attribuer le moindre poids dans le débat qui nous occupe.

Et puis si l’on compte les états qui peuvent absorber de fortes quantités d’or, pourquoi ne pas compter ceux qui pourraient être tentés de démonétiser ce métal? Ce ne serait pas une prévision chimérique, car la Hollande, pays où l’on possède au plus haut degré le sens pratique, a pris ce grand parti à peu près; la Belgique, où l’on entend les affaires, a fait de même[1]. La puissante compagnie anglaise des Indes a agi de la même façon dans ses vastes domaines.

  1. En Hollande et en Belgique, les pièces d’or continuent de circuler, mais purement et simplement comme une marchandise, et par conséquent il en est fait peu d’usage. C’est presque l’équivalent d’une démonétisation absolue.