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des plus importantes scènes de l’histoire, depuis le commencement du XVe siècle, reproduites par le pinceau habile et fidèle des grands maîtres contemporains !

Bien peu de palais génois nous dédommageront de cette lacune dans les fastes de la peinture. Ils sont curieux à d’autres titres. On sait que la plupart sont accumulés dans deux rues assez étroites, la rue Neuve et la rue Balbi, et ces deux rues, à peu près parallèles au quai du port, sont à mi-côte, puisque toute la ville est bâtie en amphithéâtre. Les deux rangées de palais ne sont donc point élevées sur des terrains de niveau, les uns étant au-dessus du sol de la rue, et les autres en contre-bas. Pour détruire, racheter ou employer ces inégalités, l’art a recours à divers expédiens. En général, la grande porte en fer de la rue s’ouvre sur un vaste vestibule qui tantôt se prolonge de plain-pied dans une cour et un jardin, tantôt communique par un beau perron avec un atrium plus élevé entouré d’un portique. Les colonnes, les marches, les balustres, sont en marbre, quoique les palais tout en marbre soient peu nombreux. Quelques-uns sont peints, et probablement tous les palais en pierre l’ont été. On sait que le palais Brignole est peint en rouge, et de là son nom de Palazzo Rosso. C’est sans doute le plus beau avec le palais Balbi. L’intérieur de celui-ci est le plus grandiose ; mais celui-là est le plus somptueux : aucun n’a peut-être rien d’aussi splendide qu’un salon du palais Serra, qui aurait, dit-on, coûté un million. Tous ont des peintures, des fresques, quelques portraits: mais les deux plus riches en tableaux sont le palais Pallavicini et le palais Brignole. On voit au premier la Madone à la Colonne, qu’on dit de Raphaël : le charme de cette peinture répond à ce nom, quoiqu’on puisse lui reprocher un peu d’affectation. Les mains potelées de la Vierge sont absolument celles d’une jolie femme, et, si j’ose dire, d’une petite-maîtresse ; mais le mouvement de l’enfant est neuf et bien trouvé. Un Cavalier avec sa famille et son cheval, par Van-Dyck, a été baptisé du nom de Coriolan et Véturie malgré un costume à l’espagnole. On croit aujourd’hui et avec raison que c’est le roi Jacques Ier avec sa femme et ses enfans. Le tableau est bon, et cette fois bien historique. De nombreux portraits de Van-Dyck sont le plus bel ornement du palais Balbi. Il n’en manque pas non plus au palais Brignole. Le plus frappant est un Brignole à cheval, vu de face et la toque à la main ; une Sainte Famille d’André del Sarto a son analogue au Louvre. Une Adoration de la Vierge du Guerchin, un Repos en Égypte de Carlo Maratti, plusieurs Paul Véronèse, dont une Judith bizarre, plus frappante par l’effet pittoresque que par la vérité historique et dramatique ; un tableau étrange où Rubens s’est peint, avec une liberté singulière, dans les intimités du