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Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 8.djvu/873

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Les cortès vont être appelées certainement à se prononcer sur une nouvelle révision, dont les conséquences ont même été évaluées pour l’équilibre à venir du budget, et déjà les intérêts éveillés commencent à s’agiter ; déjà l’on peut prévoir que l’opposition ne manquera pas d’invoquer le besoin de protéger le travail national, reproduisant à son tour contre le parti modéré les accusations que celui-ci avait si peu épargnées à la politique progressiste. Tactique aussi commode que condamnable ! Le développement de la contrebande prouve en effet d’une manière victorieuse la nécessité de remanier les tarifs, car la contrebande arrivée au point où elle s’exerce en Espagne, c’est à proprement parler le libre échange absolu, c’est presque l’introduction sans droits de ce que demande la consommation intérieure. Réviser les tarifs au contraire dans une proportion qui décourage la contrebande, c’est frapper d’un droit tous les objets qui pénètrent actuellement en franchise, et par conséquent encourager d’autant la production nationale. Réviser ainsi, c’est tenir le milieu entre la liberté absolue des échanges et cette prohibition barbare, dont l’abolition partielle, en 1849, pour tous les tissus de coton par exemple, n’a pas ruiné l’industrie de Barcelone, la seule qui en Espagne mérite vraiment le nom d’industrie. Enfin, si la révision des tarifs est nécessaire pour le développement d’une industrie nationale, que les facilités de la contrebande empêchent de naître, elle est encore souhaitable en raison de la nature des ressources de la Péninsule et du caractère spécial des matières qu’elle offre aux échanges. Toutes les nations ne sont pas appelées à jouer le même rôle dans la production universelle : à celle-ci appartient la supériorité dans la mise en œuvre, à celle-là la supériorité dans la production des matières premières. Au point de vue industriel, la contrebande est mortelle pour l’Espagne ; au point de vue de la production, la révision des tarifs dans un sens plus libéral est d’une impérieuse nécessité, puisque c’est par un commerce régulier et suivi avec les nations étrangères qu’elle pourra écouler les richesses naturelles de son sol.

Le trésor espagnol est donc loin de tirer tout le parti possible des trois principales sources du revenu public : l’impôt foncier, l’impôt indirect, le produit des régies et des douanes. Rendre ces sources plus abondantes et pourvoir ainsi à l’accroissement des dépenses urgentes, c’est là plus que toute autre la tâche du ministère actuel, et celle dont il paraît particulièrement capable. Sans parler des doctrines politiques du parti progressiste, les hommes d’état sortis de ses rangs se sont plus fait remarquer par leur intégrité (et ce n’est pas un médiocre mérite en Espagne comme ailleurs) que par leurs capacités administratives. Le parti modéré se distingue au contraire