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UNE


CONVERSATION SOUS L'EMPIRE


1809. – SARAGOSSE. – ESSLING.





On écrit admirablement de nos jours l’histoire officielle de l’empire, l’histoire administrative, militaire, diplomatique même, de cette grande époque. Rien n’est omis ; tout est démontré, mesuré, expliqué avec une puissante exactitude et un prodigieux détail. Il y a, je crois, à cela plusieurs causes, à part la première de toutes, la rencontre d’un éminent annaliste ; il y a les conditions mêmes du sujet, le caractère de l’empire, cette infatigable activité qui en faisait le plus laborieux gouvernement qu’on ait jamais vu. Sous l’impulsion et le contrôle inquiet du maître, chaque affaire de quelque importance se commençait avec ardeur, se poursuivait avec des soins infinis, et, dans l’exécution, se surchargeait ou s’aidait de tout ce que pouvait y ajouter la plus impérieuse et parfois la plus minutieuse volonté.

De là le plus vaste amas de documens, le portefeuille le plus rempli qu’aucun règne ait pu laisser, la pensée du souverain, le travail de son esprit, le rêve même de son inaction sans cesse présens dans une foule de lettres, de notes, d’ordres et de contre-ordres destinés à tout prescrire et à tout prévoir. De là, pour ainsi dire, un premier type, une première organisation sur le papier, rapide, immense, circonstanciée, plus complète que n’a jamais pu l’être l’organisation réelle, mais la représentant à faire illusion, et devant absorber ainsi l’étude et la surprise de qui peut pénétrer dans ce trésor de la foudre et des tempêtes, et contempler dans leur ensemble ou analyser,