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viendra aux actionnaires en supplément de dividende ; s’il est inférieur, l’état comblera la différence jusqu’à concurrence de la garantie de 4,65 pour 100. Les avantages de cet arrangement nous paraissent saisissans. Les porteurs des actions de chemins de fer sont désormais assurés d’un minimum de revenu à peu près équivalent aux derniers dividendes qu’ils ont touchés, revenu très satisfaisant, si on le compare aux prix actuels des actions, et l’état, pour rendre cette sécurité aux actionnaires, n’assume qu’un risque éventuel, qui n’en est même pas un à ses yeux, puisqu’on accordant les nouvelles lignes aux compagnies, il n’a jamais eu évidemment la pensée que l’exploitation de ces lignes pût leur être onéreuse. Cette solution enlève ainsi tout prétexte à la défiance qui gagnait les capitaux à l’endroit de nos chemins de fer, et elle donne satisfaction aux grands intérêts publics qui réclament le prompt achèvement de notre réseau. Certains détails de cette nouvelle charte des chemins de fer ont besoin de la sanction législative. Il nous paraît donc probable que le coups législatif sera prochainement convoqué pour lui donner le caractère légal ; on a vu un indice de la session extraordinaire à laquelle on s’attend dans le décret qui constitue le bureau du corps législatif et que publiait hier le Moniteur.

Nous croyons qu’il importe en effet que ces graves questions arrivent le plus tôt possible à la conclusion définitive et légale qui paraît être arrêtée. Le spectacle du développement industriel et du mouvement de spéculation de 1852 avait fait venir à la pensée de plus d’un observateur le souvenir de Law et des folies du système. Ce rapprochement historique n’était, grâce à Dieu, suggéré que par de lointaines analogies ; mais si la ressemblance eût été exacte, il faut avouer que le moment actuel de notre phase industrielle correspondrait à la réaction qui emporta le système et consomma la ruine des mississipiens attardés Heureusement il y avait autre chose que la foi en la présence réelle du capital sous les espèces et apparences d’un chiffon de papier, il y avait autre chose que le fantastique mirage d’une colonie encore à créer dans les grandes affaires entreprises en 1852. Il y avait d’immenses voies de communication aujourd’hui construites, et qui donnent déjà un produit brut annuel de plus de 300 millions ; il y avait un emploi sérieux et fécond du capital et du travail et la création réelle d’une vaste richesse qui survivront aux déceptions de la spéculation exagérée. Aussi est-ce bien plus les différences pratiques que les analogies apparentes qui nous frappent dans les publications récentes auxquelles l’histoire de Law a donné lieu. Un de nos collaborateurs, M. Cochut, avait publié une très intéressante étude sur le système il y a quelques années, — lorsque la spéculation était dans toutes les ivresses de la lune de miel. Aujourd’hui, au moment des désenchantemens, M. Thiers a autorisé la réimpression d’une production de sa jeunesse sur le même sujet. Ceux qui ne connaissaient que de réputation, le travail de M. Thiers sur Law, lequel fut très remarqué en effet lorsqu’il parut pour la première fois il y a trente ans, le remercieront de n’avoir pas dédaigné de faire revivre cette habile et curieuse page de finance et d’histoire. On sait que M. Thiers traite les questions de finance avec le même ingénieux bon sens, la même charmante clarté et la même autorité que les questions de guerre et de politique proprement dite. Plusieurs écrivains, en voyant Law