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QUELQUES JOURS
EN ESPAGNE



Je n’ai fait en Espagne qu’un trop court séjour pour avoir la prétention de porter un jugement réfléchi sur un pays qui demande plus que tout autre du temps et de l’attention ; je ne veux donc raconter ici que des impressions tout extérieures, de celles qui frappent au passage le voyageur le plus superficiel. Ce que j’ai vu, je l’ai vu à vol d’oiseau, et je le dis de même.

J’ai eu l’occasion d’aller en Espagne pour une raison assurément nouvelle, pour l’inauguration d’un chemin de fer. Cette idée est si peu associée à celle de l’Espagne que la majorité des Français pourrait bien apprendre aujourd’hui pour la première fois que Madrid est relié à la Méditerranée par une ligne de 455 kilomètres en exploitation complète. Il arrivera avec l’Espagne ce qui est arrivé avec les marronniers de la place de la Bourse : elle apparaîtra tout d’un coup sur la scène du monde avec un réseau de chemins de fer sans avoir passé par l’état intermédiaire. Aujourd’hui l’Espagne n’a pas même de routes de terre, demain elle aura des rails et la vapeur ; de la vitesse d’une lieue à l’heure, elle ya passer sans transition à celle de quinze ou vingt.

Le chemin de fer de Madrid à Alicante est le premier qui mette la capitale et le centre de l’Espagne en communication non interrompue avec la mer. Ce pays, si longtemps et si obstinément fermé, a désormais un côté ouvert, et c’est de ce côté que l’échange des relations tend aujourd’hui à s’établir. J’ai donc trouvé plus simple et plus sûr, pour aller droit à Madrid, de prendre le chemin de fer de Paris à Marseille, puis un bateau à vapeur de Marseille à Alicante, puis le chemin de fer depuis Alicante jusqu’à Madrid, où je vous suppose arrivé comme moi.