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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 16.djvu/577

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qualité, qu’ils parfument avec une tranche d’ail ou d’oignon; au prix moyen du pain, cette nourriture est estimée de 50 à 60 centimes par jour. Une nourriture plus variée, dans laquelle entreraient les légumes, le bouillon chaud, serait plus hygiénique et peut-être moins coûteuse.

Dans les états du sud de l’Italie et dans la Sicile, les alimens chauds ne sont qu’une exception. Les légumes crus et sans assaisonnement tels que les concombres, les racines, les herbages, les fruits tels que la cerise, la pêche, les figues, les figues d’Inde, le raisin, les melons, forment la nourriture fondamentale de la population. Aussi les cuisines semblent-elles complètement oubliées dans l’architecture italienne. Expulsé des maisons, l’art culinaire s’est réfugié dans les carrefours. C’est là que, sous un auvent, cuisent dans des chaudrons supportés par trois pierres les légumes, les pâtes, les viandes. De ces poêles où frit le poisson s’exhalent d’épais parfums, que la foule aspire avec délices. Dans les pays chauds, où une partie de la nourriture n’est pas dépensée pour réparer les pertes de chaleur, les habitans sont naturellement portés à la sobriété, et préfèrent l’usage des légumes et des fruits, en un mot des alimens rafraîchissans; mais dans ces pays mêmes les alimens chauds, indispensables dans les régions froides, n’en conservent pas moins leur supériorité substantielle et hygiénique. Au lieu de pastèques et d’eau glacée, les Arabes font un grand usage de café, et s’en trouvent fort bien; dans les parties torrides de l’Amérique, c’est avec des boissons chaudes que l’on combat la chaleur.

Le pain, qui en général est en Italie une consommation de luxe, se distingue par la bonne qualité du froment, attendu que toutes les terres, favorisées par le climat, conviennent à cette production. En France, l’orge et l’avoine ont disparu presque partout de la manne à pétrir, excepté dans la courte période qui sépare la récolte hâtive de l’orge de celle du froment; mais le seigle, dont le pain est débilitant et peu substantiel, se trouve encore exclusivement en usage dans les pays les moins fertiles. Il en sera longtemps de la sorte; il faudra bien des capitaux employés en améliorations pour élever certaines terres à la culture du froment. La consommation du maïs est considérable dans l’Italie du nord comme dans le midi de la France; on le prépare à l’état de bouillie (polenta) avec l’eau et le sel pour tout assaisonnement. A part la Lombardie et les États-Romains, les laitages, vu la rareté du bétail, entrent fort peu dans la nourriture générale, qui est des plus simples. Cependant la culture, mieux aménagée, pourrait augmenter facilement le nombre et la qualité des animaux domestiques. La frugalité n’est pas du reste l’apanage exclusif des ouvriers et clés paysans en Italie; elle est aussi pratiquée comme vertu cardinale dans les classes élevées.