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le magnétisme terrestre semblent prouver, suivant le colonel Sabine, que le soleil est un aimant, comme la terre elle-même, et sans doute comme les autres planètes. Toutes les forces qui prennent naissance dans le soleil ne sont pas uniquement dépensées dans les limites du système planétaire dont il est le centre ; les rayons de lumière et de chaleur qui ne rencontrent point les corps qui en font partie ne sont point perdus et contribuent encore dans leur mesure à perpétuer l’harmonie des cieux : ils vont rencontrer dans des parages éloignés d’autres soleils, d’autres planètes, et sur leur trajet entretiennent, dans ce que nous nommons improprement le vide, le mouvement qui ne peut y cesser, puisqu’il faut bien qu’il s’y maintienne une certaine température, si basse qu’elle soit, et que la nuit absolue ne saurait régner où peut arriver le rayon le plus affaibli d’une seule étoile. La nuit d’ailleurs la plus complète, la plus noire, ne prouverait pas encore l’anéantissement de tout mouvement. Dans le spectre solaire que nous obtenons avec le prisme, nous savons qu’en dehors des rayons colorés il y a des rayons obscurs qui jouissent de remarquables propriétés chimiques et calorifiques ; bien plus, d’obscurs ils peuvent devenir eux-mêmes lumineux, pourvu qu’on interpose sur leur trajet certaines substances particulières, le sulfate de quinine par exemple, ou une dissolution de la matière verte des végétaux. Ce qui constitue la lumière peut rester dans un corps sans être perceptible directement, s’y accumuler en quelque sorte et ne s’en séparer que très lentement. M. Niepce de Saint-Victor expose à la lumière des gravures, les imprègne en quelque sorte de soleil, puis les met dans une complète obscurité au contact d’un papier photographique sensible, et obtient des épreuves par le flux lent et invisible de la lumière, qui s’était, suivant son expression, emmagasinée dans la gravure. Dans l’obscurité, il y a donc, sinon de la lumière, au moins quelque chose qui agit comme elle et peut facilement être rendu visible : il est aussi impossible de supposer un corps privé de cette espèce particulière de mouvement qu’une substance sans température. Le mouvement ne peut s’anéantir dans la matière : d’une extrémité à l’autre de l’infini, il se propage sans fin, se transformant sans rien perdre de son énergie et entretenant la solidarité de toutes les parties de l’univers. Toutes les modifications que nous découvrons dans les corps ne sont que des mouvemens particuliers ; en un mot, imaginer la matière immobile, c’est vouloir en anéantir la notion même.

Cet aperçu du monde est bien différent de la conception géométrique des astronomes. Pour expliquer le mouvement des astres, ils supposent un état de repos initial absolu. Ils admettent ensuite que chaque corps ait reçu une impulsion particulière, et se soit mis en