Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 18.djvu/412

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le point précis où il se forme, elle distingue les organes conducteurs de l’agent nerveux de ceux qui le produisent, de même que la physique démontre quels métaux conduisent l’électricité, quelles machines la dégagent, puis en expose les effets divers. La précision a pénétré dans chacune de ces deux sciences, mais la première ne satisfera personne tant qu’elle ne dira rien de plus sur l’essence même de la force qui est mise en jeu. C’est sans doute, à un certain point de vue, un avantage pour cette science que d’être ainsi élevée jusqu’au niveau de la philosophie, et c’est une preuve que sa supériorité sur toutes les autres n’est pas méconnue. On conçoit d’ailleurs que les hommes soient plus curieux de cette étude que de toute autre. Soit; mais c’est aussi un danger, car cette tendance, qui peut la faire admirer de ceux qui l’ignorent, peut souvent fausser l’esprit de ceux qui la savent et la faire dédaigner par ceux qui tentent d’y trouver ce que doit avant tout offrir une science, l’exactitude et des faits.

L’étude du système nerveux surtout se complique naturellement des plus graves problèmes, et cette étude est le but principal de la physiologie. Si dans les phénomènes nerveux on pouvait rendre raison de tout, expliquer toute chose, les causes comme les effets, les bien connaître ne serait plus savoir une partie de la science, une branche de la physiologie; ce serait presque savoir toute science, et en particulier la philosophie proprement dite, car la sensibilité connue dans ses profondeurs supposerait une science complète de l’être. Malheureusement nous n’en sommes pas là, et il faut se dire que la science contient, qu’elle contiendra toujours sans doute bien des parties mystérieuses. Dans la simple action de lever le bras, il faudrait, pour ne rien laisser d’obscur, expliquer le raisonnement qui nous y porte, la volonté qui en décide, la transmission de la volonté qui fait enfin contracter les muscles. Rendre clairement compte de tout cela serait impossible, mais on peut distinguer les divers phénomènes, écarter d’abord ceux qui sont de la compétence de la physique et qui s’expliquent par la théorie du levier, puis laisser la pensée et le raisonnement dans le domaine de la philosophie, et garder pour la physiologie la transmission de la volonté aux muscles qui doivent se contracter. Les phénomènes vitaux sont assujettis aux lois générales, et il faut avant toute chose déterminer dans ces actions compliquées ce qui peut et ce qui doit être le résultat des causes recherchées par d’autres sciences, ou de phénomènes placés au-dessus des connaissances positives, pour n’étudier enfin que ce qui doit faire partie de cette science spéciale à laquelle on a donné le nom de physiologie.

On conçoit ainsi qu’il y ait deux manières de considérer les phé-