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filets vasculaires et ligneux, dans de grandes cellules cylindriques à très minces parois, et qui sont criblées de très petits trous. Ces grandes et minces cellules, latéralement poreuses, sont closes par deux membranes imperméables qui en bouchent les deux extrémités inférieure et supérieure.

En considérant la disposition du liquide sucré renfermé dans de grandes cellules à très minces parois, il est facile de comprendre que sous une pression énergique ce liquide détermine la rupture des cellules et s’en écoule librement. On sait que dans la betterave[1] le tissu spécial qui renferme le sucre est également disposé autour des faisceaux vasculaires qui traversent dans toute sa longueur la racine saccharifère ; mais ce tissu spécial, disposé d’ailleurs par zones concentriques, est formé de cellules allongées, tellement petites et résistantes que la plus énergique pression exercée sur les betteraves entières n’en saurait faire sortir le jus, et qu’il est indispensable de diviser à la râpe ces racines en une pulpe très fine pour en obtenir le jus sucré.

La canne à sucre dans son ensemble offre la plus grande ressemblance avec le sorgho sucré, qui a été précédemment décrit[2]. Ses tiges élancées, hautes de 2 ou 3 mètres, sont de même garnies à chaque nœud de feuilles engainantes, longues de 60 à 80 centimètres, offrant une fine denture acérée sur leurs bords. Ces longues feuilles se développent successivement de bas en haut à mesure que la plante grandit, puis aux approches de la maturité elles tombent dans le même ordre. Aussi, lorsque l’époque de la maturité est arrivée, et que les tiges amincies à leurs sommets développent en un seul jet le scion terminal allongé qui se ramifie et se couronne d’une panicule argentée, la plante ne présente plus que les feuilles verdâtres de sa partie supérieure ; toutes les autres feuilles jaunies et caduques jonchent le sol, ramenant à la superficie une partie des élémens organiques et minéraux qu’elles ont puisés dans la terre ou empruntés aux gaz atmosphériques. C’est alors que la récolte des tiges commence ; on les coupe au-dessus de la souche, puis en deux ou trois bouts, suivant la hauteur, et en supprimant avec la flèche l’extrémité encore verte, pauvre en matière sucrée, relativement abondante en substances étrangères. Dès ce moment aussi commencent les altérations spontanées, plus rapides sous ces climats chauds, qui accroissent les difficultés de l’extraction du sucre aux colonies, et nécessitent des précautions particulières, des moyens prompts, et les garanties les plus sûres contre toute inter-

  1. Voyez la Revue du 1er  novembre 1857.
  2. Revue du 1er  mai 1858.