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Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 20.djvu/676

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unes dans le Pô, les autres dans l’Adriatique. Toutes offrent à peu près les mêmes caractères; torrentielles près des gorges de la montagne et parcourant alors un pays peu praticable aux armées, elles forment des lacs à leur arrivée dans la plaine, qu’elles fécondent par leurs nombreuses dérivations; puis, ralentissant toujours leurs marche, elles s’entourent vers leur embouchure de vastes marécages où l’on cultive en abondance le riz, qui contribue à rendre ces contrées fiévreuses et malsaines. Partout dans ce pays l’on rencontre des canaux, des haies, des jardins et des vignes, ce qui constitue un terrain coupé des plus favorables à la défense. Par suite de cette nature du sol, on ne sera pas surpris d’apprendre que la proportion de la cavalerie, qui est ordinairement du cinquième au sixième dans les armées destinées à agir en pays de plaine, se réduit au dixième seulement pour celles qui doivent opérer en Lombardie.

Les rivières de la Vénétie, qui ne forment que rarement des lacs, sont plus torrentielles que celles du duché de Milan et se perdent dans des marais plus considérables, qui envahissent la côte entière de l’Adriatique; mais elles ne forment, à l’exception de la Piave, que de très médiocres lignes de défense. Des travaux de fortification passagère ont été faits à plusieurs époques sur les bords de la Piave et du Tagliamento, ils n’ont que peu de valeur; des lignes aussi longues peuvent toujours être franchies sur quelque point moins bien gardé que le reste, et les défenseurs dispersés sont réduits à faire des retraites divergentes et désastreuses.

Ces lignes transversales ne sont pas d’ailleurs les seules, ni même les meilleures bases de la défense du pays. Le plus grand avantage des Autrichiens en Italie consiste dans la possession du Tyrol, pâté montagneux qui s’avance dans la plaine et la domine comme une citadelle. Il ne laisse qu’une étroite bande de terrain entre le Milanais et la Vénétie. La faible largeur de cette bande est encore réduite par le lac de Garde et par les marécages que forme le Mincio avant de rejoindre le fleuve dans lequel il se perd. Le massif des Alpes du Tyrol, ainsi jeté au centre même de l’Italie, a toujours fourni aux empereurs d’Allemagne leur base d’opération contre la péninsule, et a été le grand obstacle à l’indépendance de ce pays. Maintenant encore c’est au sortir de ses gorges que se trouvent les forteresses où l’Autriche a établi le centre de sa domination militaire; c’est dans les montagnes elles-mêmes, dans la vallée supérieure de l’Adige, que se trouve le nœud de toutes les routes militaires. Les habiles dispositions de l’Autriche pour tirer le parti le plus avantageux de cette position déjà formidable par elle-même nous conduisent naturellement à étudier les places fortes de la Haute-Italie.