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le Piémont de Milan se trouverait donc au milieu d’un pays occupé par les troupes ennemies. Le passage d’un fleuve aussi considérable que le Pô en présence d’une armée présenterait de très grandes difficultés. La ville de Plaisance, qui offre le pont le plus commode, est aussi par elle-même un obstacle très réel. Son enceinte de vieilles murailles renforcée de tours ne se prêterait qu’à une médiocre résistance ; mais pour mettre le pont qui fait son importance militaire à l’abri d’une surprise, le gouvernement autrichien a imposé au duché de Parme la construction tout autour de la place de redoutes capables de soutenir un siège. Elles forment par leur réunion un grand et solide camp retranché où un corps nombreux pourrait trouver un abri et braver des forces supérieures. Le passage du fleuve à Plaisance offrirait donc le danger sérieux d’un grand siège en présence d’une armée qui accourrait au secours de la place assiégée. Crémone, dont les fortifications, déjà faibles à l’époque où le prince Eugène en tenta la célèbre surprise, ont été abandonnées depuis, présenterait moins d’avantages encore, car cette ville est sur la rive gauche du fleuve. On se trouverait là en présence d’un pont coupé, exposé aux diversions que ne manquerait pas de tenter la garnison de Plaisance. Brescello, situé plus bas, sur la rive droite, n’est qu’un petit fort, mais il est rapproché de Mantoue, et aurait l’inconvénient de laisser sur les derrières de l’armée les deux passages de Plaisance et de Crémone. L’état-major autrichien a donc cru, avec une apparence de raison, avoir paré suffisamment aux éventualités d’une marche sur la rive droite du Pô par l’établissement du camp retranché de Plaisance, camp dont l’établissement n’était pas prévu par les traités.

Il y a plus de chances pour que le théâtre de la guerre reste sur la rive gauche du fleuve. À la rupture de la trêve, en 1849, le maréchal Radetzky, prévenant les Piémontais, prit l’initiative des mouvemens et attaqua ses adversaires au-delà du Tessin. Sans imiter servilement les manœuvres qu’il a exécutées, les officiers autrichiens ne sont point disposés à céder sans une vigoureuse résistance les lignes du Tessin et de l’Adda, qui couvrent le duché de Milan. Ils trouveraient cependant, à cause de la longueur du cours de ces rivières dans la plaine, et de la multiplicité des points où l’on peut les traverser, de grandes difficultés à la défense de cette partie du territoire.