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« Napolitains, disait-il,… notre plus ferme et plus immuable désir est de maintenir la constitution du 10 février pure et intacte d’excès de toute sorte. Cet acte étant le seul compatible avec les besoins réels et existans de cette partie de l’Italie sera l’arche sacrée sur laquelle doivent reposer la destinée de notre peuple bien-aimé et celle de notre propre couronne. Les chambres législatives seront convoquées sous peu de jours, et la sagesse, la fermeté et la prudence que nous attendons d’elles nous seront une assistance puissante dans toutes les parties des affaires publiques qui réclament de sages et utiles réformes. Confiez-vous entièrement en notre honnêteté, en notre religion et en notre sacré et spontané serment… » De ces promesses royales, la seule qui fut tenue, ce fut la convocation prochaine d’un parlement nouveau après une modification de la loi électorale, ou plutôt après un retour à la loi primitivement élaborée par M. Bozzelli et abrogée par le ministère du 3 avril. Par le fait, quelle que fût l’impopularité de M. Bozzelli, sa présence dans le conseil après les événemens du 15 mai était encore le gage d’une politique peu sympathique pour l’Italie, il est vrai, mais relativement libérale. M. Bozzelli lui-même aimait à se représenter en ces heures critiques comme un conciliateur appelé à sauver la constitution des excès des partis et des excès de la réaction. On peut même dire qu’après des violences momentanées de compression, le régime s’adoucit bientôt un peu, et l’état de siège fut levé le jour des élections nouvelles, le 15 juin. On entrait donc ou l’on semblait entrer sous de plus calmes auspices dans cette expérience constitutionnelle si brusquement interrompue et éclipsée un mois auparavant par le sanglant tourbillon du 15 mai.

C’est le 1er juillet que se réunissait le nouveau parlement napolitain, et cette inauguration du régime constitutionnel s’accomplissait au milieu d’un silence morne, sans pompe extérieure. Le roi n’assistait pas à l’ouverture du parlement. Ce fut le duc de Serra-Capriola, président du conseil d’état, qui lut le discours royal et ouvrit la session. Quel était l’esprit de cette chambre nouvelle sortie des élections du 15 juin ? L’élément constitutionnel dominait. Sans être sympathique au ministère, qui ne comptait qu’une petite phalange fidèle dont le membre le plus énergique et le plus intelligent était M. Luigi Blanch, l’immense majorité n’avait qu’une pensée de légalité. Je ne dis pas qu’elle mit toujours le tact le plus consommé dans une crise si délicate et si épineuse ; elle cherchait toutefois visiblement à éviter les occasions de conflit et ne dépassait pas les limites d’une discussion strictement constitutionnelle. Le talent ne manquait pas dans cette chambre, où brillait un instant la vie parlementaire napolitaine. Charles Poerio était un orateur habile,