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bientôt par leur blancheur pure d’agréables oppositions avec les vives couleurs vertes, jaunes et rouges des fruits, suivant les progrès de la maturation. Le spectacle enchanteur de la floraison des cafiers ne dure, il est vrai, que peu de jours, mois il se renouvelle plusieurs fois pendant la durée du printemps : trois floraisons en général ont lieu tous les ans, à trois semaines ou un mois d’intervalle. La première apparition des fleurs dépend de la saison où les pluies commencent, elle varie du 1er mars à la mi-avril ; cette floraison est en outre subordonnée à la température locale, qui est elle-même en rapport avec la hauteur des lieux où la plantation se trouve établie. L’exposition soit au sud, soit au nord, exerce aussi son influence pour accélérer ou retarder les phénomènes successifs de la floraison, de la fructification et de la maturité complète ; celle-ci s’annonce par la teinte brune, graduellement plus foncée, qu’acquièrent les fruits en perdant dès lors leur belle nuance rouge.

Le cafier fait partie de la famille des rubiacées. Les rubiacées de nos climats sont en général des plantes herbacées et annuelles, comme la garance. Les rubiacées des pays chauds forment au contraire un groupe très varié de plantes ligneuses, où l’on remarque le café, l’ipécacuana, les quinquinas jaune et rouge, le kino. Parmi ces plantes, les unes sont riches en principes colorans, les autres douées de propriétés éminemment toniques, astringentes ou nutritives. C’est à la fois comme plante tonique et nutritive que le café a pris place dans l’alimentation publique. L’usage du café était depuis longtemps répandu en Orient quand il s’introduisit en Europe, vers le commencement du XVe siècle. Ce ne fut pas toutefois sans difficulté que cet usage s’établit, même en Orient. Dans l’empire ottoman par exemple, la consommation du café eut à lutter contre de nombreux obstacles dès qu’elle devint une occasion de réunion dans des lieux publics. Amurat III fut un des princes les plus hostiles aux consommateurs de café, il fit fermer les établissemens où l’on débitait l’odorante liqueur. Après un intervalle d’un régime plus doux, cette tradition de sévérité fut reprise sous la minorité de Mahomet IV et abandonnée définitivement en 1554, sous le règne de Soliman le Grand.

On connaît généralement les vicissitudes qu’a traversées la consommation du café en Europe. Introduit à Venise en 1615, à Marseille en 1654, le café paraissait à Paris en 1657, sous les auspices du voyageur Thévenot, et devenait tout à fait à la mode en 1669, grâce à l’initiative de l’ambassadeur ottoman Soliman-Aga. Bientôt, vers 1673, s’ouvrirent des cafés publics, tels que celui du Florentin Procope et de Grégoire d’Alep. Alors aussi la consommation du café devenait une question médicale, et l’on commençait à s’occuper des