Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 25.djvu/259

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le 7 novembre, âgé de soixante et un ans. Né le 31 janvier 1798 à Betzi, près de Wittenberg, Reissiger, qui était le fils d’un musicien, fut initié de très bonne heure aux principes de la musique. Envoyé à l’université de Leipzig en 1818, Reissiger s’adonna pendant quelque temps à l’étude de la théologie, qui en Allemagne est la base de toute éducation libérale. Soutenu par des amis généreux, Reissiger, qui était fort pauvre, reprit avec ardeur l’étude de la composition sous la direction d’un nommé Schicht, qui fut pour lui un bienfaiteur, et il se rendit à Vienne en 1821, où il composa son premier opéra, qui ne fut pas représenté. En 1822, Reissiger quitta Vienne pour aller à Munich prendre des conseils du célèbre compositeur Winter. Après avoir obtenu beaucoup de succès par la composition d’une ouverture sur un thème de cinq notes que lui avait donné Winter, Reissiger partit pour Leipzig et pour Berlin, où le roi de Prusse, charmé de ses talens, lui donna les moyens de faire un voyage en Italie. Reissiger vint à Paris en 1824 et séjourna dans cette grande ville pendant toute une année. Il se rendit en Italie, visita Milan, Bologne, Florence, Rome, Naples, et puis retourna à Berlin à la fin de 1825, où il fut chargé de dresser le plan d’un conservatoire de musique à l’instar de celui de Paris, qu’on voulait établir dans la capitale de la Prusse. Au mois d’octobre 1826, Reissiger fut nommé directeur de la musique du roi de Saxe à la place de Marschner, qui était appelé à la cour de Hanovre, où il est encore. Reissiger a occupé ce poste jusqu’à sa mort. Compositeur plus fécond qu’original, il a écrit cinq ou six opéras qui ont eu du succès, une grande quantité de messes et de motets, beaucoup de musique instrumentale. Imitateur facile de Weber surtout et de beaucoup d’autres maîtres, Reissiger produisait incessamment et livrait à la gravure tout ce qui s’échappait de ses mains. Il est l’auteur d’une jolie valse qui circule dans le public sous ce titre menteur : la Dernière Pensée de Weber. Reissiger a réclamé lui-même dans les journaux la paternité de cette heureuse inspiration. « La Dernière Pensée de Weber, dit Reissiger dans une lettre à un ami, a été composée…par moi en 1822 et envoyée dans la même année à l’éditeur Peters, à Leipzig, qui la fit graver à la suite de mon trio, opéra 26. Je l’ai jouée souvent à Leipzig en public, et toujours avec un grand succès. Je l’ai communiquée à Weber, qui en fut charmé, et qui la jouait souvent. Cette valse a été publiée à Paris par un spéculateur sous le titre qui’ l’a rendue populaire. » Puisque je touche en passant à cette question délicate de l’authenticité de certaines compositions musicales", je dirai aussi que la valse si populaire qu’on attribue à Beethoven est de Schubert, et que l’admirable mélodie de l’Adieu, qu’on a mise dans l’œuvre de Schubert, est d’un compositeur modeste dont j’ai oublié le nom. Les erreurs de ce genre sont innombrables dans le commerce de musique, surtout en France et en Angleterre.

Un chanteur célèbre, qui pendant longtemps a fait les délices du Théâtre-Italien, Tacchinardi, père de Mme  Persiani, est mort aussi l’année dernière à Florence, âgé de soixante-quinze ans. Né dans la capitale de la Toscane en 1776, imitateur élégant de Babbini, un des plus admirables ténors italiens du commencement de ce siècle, Tacchinardi, qui était un artiste instruit et fort distingué, vint à Paris et débuta à l’Odéon, le 4 mai 1811,