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choix des preuves de l’existence de Dieu a été dans un certain rapport avec les progrès de l’esprit humain, M. Buchanan pense qu’aucune sorte de preuve n’a été inconnue à aucune époque, et que toutes les preuves ontologiques ou physico-théologiques, a priori et a posteriori, doivent être concurremment employées, quoique rangées avec ordre, et composer ce qu’il appelle la preuve de Dieu. Chacun des argumens particuliers n’est en quelque sorte qu’une des parties, une des considérations graduées dont l’ensemble établit dans l’esprit la conviction religieuse. Ainsi de ce fait d’évidence naturelle que quelque chose existe, il résulte indubitablement qu’il existe quelque chose par soi-même et de toute éternité. Les athées ne le nieraient pas, et c’est déjà la preuve que le passager peut croire à l’éternel, et le fini à l’infini. Puis l’existence de l’esprit, c’est-à-dire d’un être qui pense, veut, a conscience de sa pensée et de sa volonté, quelle que soit d’ailleurs sa nature, est également un fait irréfragable. Or, comme cette existence, qui est celle de l’homme, a commencé, elle a une cause, et cette cause ne peut être mécanique, car elle ne peut manquer d’attributs qui répondent à ceux de son effet. Cette conscience de l’être intelligent comprend un certain ordre de pensées qui, étant essentiellement morales ou offrant le caractère de l’obligation, se rapportent à une loi, et il suit que l’auteur intelligent de l’être intelligent est nécessairement législateur. D’un autre côté, il est impossible de contempler le monde sans éprouver une impression suivie d’une réflexion, et l’une et l’autre sont successivement la poésie et la philosophie de la nature. Cette philosophie nous montre partout les marques d’un dessein, et ce dessein, M. Buchanan, comme tous les écrivains de son île, se plaît à le prouver, à l’illustrer par des exemples nombreux, trop nombreux même ; car il faut une critique plus sévère dans le choix des enchaînemens de phénomènes qui peuvent attester l’adaptation des moyens à une fin. L’observation lui montre des vestiges de création ou du moins de commencement des choses. La prétention même d’écrire l’histoire naturelle de cette production successive l’a constatée comme un fait. Que les espèces organiques aient commencé au moins n’est pas douteux, et leur existence actuelle atteste un créateur, ou tout au moins un formateur. Parvenu ainsi à la notion d’une cause intelligente, si, au lieu d’étudier l’objet qui la suggère, on considère le sujet qui la conçoit, on peut concevoir avec saint Anselme ou Descartes l’être absolument parfait, avec Clarke l’être nécessaire, et l’unité de dessein dans l’univers, l’harmonie de ce que suggère l’objet et conçoit le sujet, donne l’unité de Dieu. Enfin, comme il y a une corrélation évidente entre les propriétés de la matière et les facultés de l’homme, comme les premières ne paraissent pas nécessaires, mais contingentes, il apparaît ici la plus grande