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ans. L’article 35 de cet exposé se bornait en effet à dire qu’on adjoindrait aux autorités de cercle et de gouvernement des comités délibérans composés de la noblesse héréditaire, de petits et grands seigneurs, d’industriels : si l’on avait besoin d’autres représentans aux comités, on y aurait égard. L’article 36 et dernier portait aussi que, dans les tribunaux d’arrondissement, souverains, on appellerait de temps en temps les chefs des communes et les grands propriétaires, ou leurs fondés de pouvoirs, pour les consulter sur leurs affaires.

Les peuples de l’Autriche accueillirent la constitution Schwarzenberg avec la même docilité que les précédentes. Elle put fonctionner sans opposition, ou plutôt tout se borna à la nomination de juges et de fonctionnaires administratifs revêtus d’un pouvoir discrétionnaire et relevant du gouvernement central. Dans le tableau des divisions administratives et judiciaires de l’empire, ce qui s’appelle gouvernement d’état, de cercle ou de district en Autriche, en Bohême, en Moravie, s’intitule administration de territoire en Silésie, siège de comitat, siège de juge en Hongrie, etc. Au fond ce sont les mêmes fonctions, émanant de la même source, jouissant des mêmes prérogatives, c’est-à-dire que partout on retrouve la même absence de prescriptions définies et de lois organiques. Depuis 1851, quelques propriétaires ont pu prendre le titre de membres d’états provinciaux sans en avoir jamais exercé les pouvoirs. Un noble autrichien loge à Vienne, au palais des états, et conserve la qualification de secrétaire de la diète, sans avoir jamais été astreint de ce chef à un travail quelconque. Le corps municipal, le bourgmestre de la capitale elle-même, sont restés en place depuis l’époque de la révolution, et n’ont vu renouveler leur mandat par aucune élection. En un mot, l’attente s’est continuée sans impatience apparente du public comme sans souci du gouvernement. En 1859 paraissait enfin une volumineuse loi contenant les principes selon lesquels les constitutions des diverses communes pourraient être établies ; mais presque en même temps la Gazette de Vienne publiait un avis portant que cette loi des communes allait être modifiée selon les besoins du pays, de telle façon qu’on dut la considérer comme mort-née.

On peut donc dire avec vérité que s’il y a en Autriche une organisation administrative, il n’y a pas de législation intérieure ; l’arbitraire le plus absolu règne et s’exerce par l’intermédiaire des agens que le souverain dirige au gré de sa volonté irresponsable. Les manifestations de la volonté impériale elle-même ne sont ni toujours publiques, ni uniformes. Elles se traduisent tantôt par une patente, un manifeste, un décret, précédé ou non de l’avis d’un conseil d’état qui fonctionne quand et comme on le veut, et qui, dit-on, va devenir