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rapporter aucun profit, qui ne mènent ni à la fortune, ni à la réputation ? Bien peu en vérité se contenteront d’ajouter un élément unique à une foule d’autres élémens, dans la seule espérance que de ce vaste ensemble surgisse un jour quelque grande théorie. De là même sont nées pour la météorologie des conditions nouvelles qui méritent examen.

Bannie de nos foyers, où nous pourrions si facilement la recevoir, la météorologie s’est vue forcée de s’installer dans des observatoires spéciaux : elle y absorbe d’une manière fâcheuse un temps qui pourrait être plus utilement consacré à l’observation des phénomènes célestes. Tandis qu’associée aux travaux et aux occupations ordinaires, surtout parmi ceux qui habitent la campagne, elle pourrait remplir agréablement des heures trop souvent inoccupées, elle n’est plus qu’une fatigue et un objet de dégoût pour ceux qui dans les grands observatoires ou dans des stations spéciales en sont devenus les victimes. En prenant le rang de science officielle, elle a dû former ses cadres ; elle a enrégimenté et assujetti des intelligences d’un ordre souvent supérieur à des soins qu’elles doivent trouver fastidieux, en comparaison des objets plus élevés qu’elles se sentent capables d’atteindre. Ce mariage un peu forcé qui s’est opéré par le hasard des circonstances entre l’astronomie et la météorologie a sans doute quelques avantages réels, mais ce n’est pas toujours la science qui en tire profit. Que d’illusions ne crée pas dans la masse du public le mot d’observatoire ! Tout d’abord il éveille le respect, l’admiration instinctive pour les plus hautes études, les spéculations les plus transcendantes. Tout le monde ne fait pas très nettement la distinction entre un observatoire astronomique et un observatoire météorologique, surtout depuis qu’un très grand nombre d’établissemens ont à la fois ce double caractère. Les météorologistes recueillent ainsi une part de la considération qui de tout temps et à fort bon droit s’est attachée aux astronomes de profession, et ils acquièrent quelquefois, à bien bon marché, la réputation de vrais savans. Ceux qui sont placés à la tête des observatoires astronomiques peuvent de leur côté, quand l’esprit de recherche scientifique s’y éteint et que les découvertes y font défaut, être tentés de créer des illusions sur la fécondité des établissemens qu’ils dirigent, sur le nombre et l’importance des travaux qui s’y poursuivent, en accumulant d’indigestes observations météorologiques dans de majestueux in-quarto qui trouvent une place obligée sur les rayons des bibliothèques savantes. On conçoit ainsi jusqu’à un certain point la défiance avec laquelle des esprits sérieux ont parfois accueilli les prétentions de la météorologie ; ils ont craint sans doute de voir les études importantes sacrifiées à des recherches moins utiles, noyées dans une mer de chiffres stériles ; ils n’ont pas vu sans inquiétude la