Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 29.djvu/364

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

certains procédés d’exécution et pour reproduire certains types créés par la main des hommes.

La religion de l’antique n’a donc pas cessé, bien qu’avec des alternatives diverses, de rencontrer des disciples dévoués parmi les artistes de notre pays. Dans ce zèle d’imitation toutefois, des préférences pour l’art romain sont sensibles, et cela peut s’expliquer par la richesse de nos musées en monumens des époques impériales comme par la rareté des chefs-d’œuvre de l’art grec publiquement proposés à l’étude avant le temps où nous vivons. Peut-être aussi faut-il attribuer la prédilection des sculpteurs français pour la statuaire romaine à une affinité secrète entre les principes que celle-ci résume et les tendances instinctives, le génie même de l’art national. Notre école de sculpture, la plus savante d’ailleurs et la plus riche des écoles modernes à partir de la seconde moitié du XVIe siècle, — sans parler des gages fort significatifs pourtant qu’elle avait donnés déjà vers la fin du XIIIe, — notre école de sculpture se distingue en général par le goût du vrai, par l’intelligence de la physionomie et du caractère personnel, bien plutôt que par le sentiment de la beauté idéale. De là son excellence dans l’art du portrait et cette suite non interrompue de belles œuvres en ce genre, depuis la statue de l’amiral Chabot jusqu’au Voltaire de Houdon. Or, avec un style et des moyens d’exécution différens la sculpture romaine procède d’un fonds d’inclinations et de qualités analogues. Lors même qu’ils poursuivaient un autre objet que la science du fait et de la vérité positive, il était dojic naturel que les artistes français choisissent la route la plus voisine de celle où ils avaient coutume de marcher et qu’ils prissent pour guides les maîtres de l’antiquité romaine, parce qu’ils n’avaient besoin pour les comprendre ni d’oublier complètement leur propre langue, ni de renoncer aux habitudes innées de leur esprit. Sous David encore, c’est-à-dire au moment où la recherche de la pureté du style semble plus active et plus absolue que jamais, le mouvement de retour vers l’antiquité ne va guère au-delà de cet idéalisme mesuré. Ce n’est qu’un peu plus tard, lorsque, au temps de la restauration, les épreuves en plâtre des marbres du Parthénon et la Vénus de Milo viennent prendre place dans les salles du Louvre, qu’une ambition nouvelle surgit au sein de notre école, et que l’art grec, étudié pour la première fois dans ses manifestations les plus hautes, suscite ou modifie quelques talens dont les œuvres se succèdent pendant vingt années environ : œuvres sages et correctes plutôt que décidément expressives, talens bien intentionnés, dont la manière de Cortot résume mieux qu’aucune autre les croyances et les nobles désirs, mais auxquels ont manqué, pour le plein succès de l’entreprise, cette audace dans